Le 4 Juin dernier, à l’occasion de l’audition en Commission Défense de Monsieur Jean-Paul BODIN, secrétaire général pour l’administration, Philippe FOLLIOT est intervenu pour le questionner sur les coûts entrainés par le regroupement des services du ministère de la Défense sur le site Balard 2. En effet, ce regroupement des états-majors a été décidé en 2008 afin d’améliorer la gouvernance du ministère, de rationaliser des emprises parisiennes et pour réduire des coûts de soutien de l’administration centrale. L’opération vise également à dégager des recettes importantes dans le cadre de la loi de programmation. C’est dans ce contexte que Monsieur Philippe FOLLIOT a posé une question à Monsieur Jean-Paul BODIN sur le régime spécial « supposé » du ministère de la défense notamment en en ce qui concerne les obligations en matière de logements sociaux. Il a également marqué son accord avec Monsieur Yves FROMION, député du Cher, sur le décalage qui existerait entre les conditions de vie des soldats sur le terrain et les dépenses jugées non nécessaires.
Vous pouvez lire ci-dessous la transcription de l’audition mentionnée ci-dessus :
Monsieur Philippe FOLLIOT. Je partage ce que vient de dire Yves Fromion quant au décalage qu’il peut y avoir entre la vie et le ressenti de nos soldats sur le terrain, et ces dépenses que l’on pourrait juger superfétatoires. Ma question porte sur un point important : c’est la première fois que l’on nous dit officiellement que le ministère de la Défense sera totalement impacté, comme les autres ministères, par les obligations qui existent en matière de logements sociaux. On nous avait toujours dit que la Défense bénéficiait d’une exception et que les crédits issus de recettes exceptionnelles lui seraient affectés en totalité. Or vous nous avez annoncé que l’îlot Saint-Germain serait concerné par un programme de logements sociaux. Cela signifie qu’une partie de l’îlot sera aliénée à la Ville de Paris à un prix très nettement inférieur à celui du marché, ce qui représente donc des recettes en moins pour le ministère de la Défense. Je rappelle que je suis monté plusieurs fois au créneau, au cours des débats sur la loi DALO et la LPM, mais que je n’ai jamais obtenu que des réponses très évasives. Cette fois, nous pouvons constater que la Défense n’a pas de régime spécifique, s’agissant des obligations en matière de logement social. Quoi qu’il en soit, je voudrais savoir à combien vous évaluez, à ce jour, le manque à gagner que cela représente pour le ministère.
Madame Patricia ADAM, Président de la commission de la défense. De mon côté, je m’interroge sur le relogement de l’ensemble des militaires hébergés sur des sites destinés à être cédés, et ce qu’ils soient, ou non, célibataires géographiques.
Monsieur Jean-Paul BODIN. Des pénalités sont effectivement prévues dans le contrat et s’appliquent si l’opérateur ne respecte pas, notamment, la date de livraison des emprises. C’était l’objet des discussions que nous avons eues tout au cours du premier semestre 2013. En raison d’événements nouveaux – dépollution de la parcelle Ouest, problèmes d’amiante – l’opérateur nous avait dit qu’il ne pourrait pas respecter les dates initiales et qu’il fallait en fixer de nouvelles. Nous avons réussi à nous mettre d’accord sur des dates, qui sont celles que je vous ai indiquées. Nous regardons donc très attentivement le calendrier les uns et les autres.
Des pénalités peuvent également s’appliquer si les services apportés ne correspondent pas à ce qui était prévu. Dès maintenant, toute une série de tests sont en cours sur les bâtiments, les SIC, etc. dans la partie qui est livrée ; il nous arrive de demander des corrections. À la fin, nous engagerons des discussions qui prendront certainement plusieurs semaines, voire plusieurs mois et qui aboutiront, soit à un accord, soit à des contentieux. La période entre décembre 2014 et février 2015 sera particulièrement importante, avec des tests intensifs, en particulier sur les SIC. Il va de soi que nous n’avons pas seulement acheté un bâtiment, mais un bâtiment et des prestations de services. Si nous ne l’avons pas le 28 février, nous ne déménagerons pas. Le bloc opérationnel de l’îlot Saint-Germain ne quittera le septième arrondissement que si nous sommes assurés que, la conduite des opérations ne sera pas perturbée.
Revenons aux aspects financiers du projet. Les économies de fonctionnement ont bien sûr été prises en compte. Je vous ai dit que pour payer la redevance annuelle de 154 millions d’euros, nous récupérons les dépenses de fonctionnement que nous faisons aujourd’hui. D’une certaine manière, nous recyclons les sommes engagées pour ces dépenses pour financer nos dépenses futures.
S’agissant des transports en commun, une nouvelle gare de métro est créée sur le site – une nouvelle sortie à partir de l’ancienne gare Balard. J’observe malgré tout que celui-ci est bien desservi par le tramway, le RER C, le métro et les bus. D’ailleurs, cet élément avait été pris en compte lorsque l’on avait réfléchi à l’endroit où l’on pourrait éventuellement regrouper le ministère.
On peut s’attendre à une arrivée massive de personnes au même endroit, au même moment. C’est déjà le cas à l’îlot Saint-Germain, sans que l’on ait observé d’embouteillages à la porte. Et pourtant, il n’y a pas de mécanismes d’horaires variables. Il faut donc relativiser le problème que cela pourrait poser, d’autant qu’il y aura à Balard plusieurs entrées – une grande entrée pour les visiteurs, et quatre ou cinq portes par lesquelles on peut accéder au site.
Maintenant, comment faire des économies en externalisant certaines prestations ? Vous avez raison, l’externalisation est une dépense. Mais prenons un exemple : aujourd’hui, une partie de l’alimentation du personnel est faite en interne, au sein du ministère. Cette activité a été mise dans le contrat passé avec le groupement et sera donc assurée par une de ses sociétés. L’économie que nous faisons portera sur le personnel.
Je vous ai dit que 1 363 emplois allaient être supprimés. Il s’agit principalement d’emplois dans les soutiens. Les activités de gardiennage, de nettoyage, d’entretien des bâtiments seront externalisées. L’économie que nous faisons est une économie en emplois – qui nous permet de transformer du titre 2 en titre 3. Ensuite, je vous rassure, nous n’avons pas saccagé le mobilier national qui nous a été affecté. Nous n’en avons pas moins certaines obligations par exemple la restitution des tableaux aux fonds national d’art contemporain se fait après restauration.
Monsieur Yves FROMION. On n’a qu’à le laisser au mur !
Monsieur Jean-Paul BODIN. On ne peut pas laisser au mur des œuvres qui sont liées à l’histoire du ministère. Vous avez raison d’insister sur le ressenti des militaires du terrain, par rapport à la situation de l’administration centrale. L’administration centrale et les états-majors vont en effet se retrouver dans des locaux neufs, parfaitement équipés, chauffés, etc. alors que nous savons bien que ce n’est pas le cas dans beaucoup de casernes. Le maximum a donc été fait pour éviter les installations tapageuses ou somptuaires ; le mobilier n’est pas non plus ostentatoire. Il faudra malgré tout être très attentif à cet aspect.
Le bâtiment restera effectivement noir, conformément au choix de l’architecte. À l’intérieur, il y a des couleurs, et même beaucoup, qui peuvent elles aussi susciter des discussions. Mais c’est une affaire de goût, et je préfère ne pas avoir d’avis sur le sujet.
Je terminerai par les obligations en matière de logement social : la loi s’applique au ministère de la Défense comme à l’ensemble des services de l’État. Lorsque l’un des services de l’État abandonne un immeuble, si les collectivités locales ont des projets de logement social sur cet immeuble, la loi s’applique automatiquement. Il n’y a jamais eu de dérogation prévue dans ce domaine.
Cela fait l’objet de discussions avec les collectivités locales. En l’occurrence, pour les cessions parisiennes, nous avons discuté avec la Ville de Paris. Si nous pouvons vendre la caserne de la Pépinière en immeuble de bureaux, c’est parce que la Ville a accepté que les obligations de logement social, qui pouvaient peser sur l’immeuble de la Pépinière et sur un autre immeuble qui est situé à proximité et aujourd’hui utilisé par un autre ministère, s’appliquent uniquement sur cet immeuble d’un autre ministère. Nous ne subirons donc pas de décote dans la mesure où l’on pourra vendre la caserne en tant qu’immeuble de bureaux.
D’autres discussions ont porté sur les immeubles du septième arrondissement. Il me paraît tout de même raisonnable d’avoir envisagé d’appliquer l’obligation de logement social sur l’îlot Saint-Germain plutôt que sur des ensembles comme Bellechasse ou les hôtels particuliers de la rue de Grenelle : d’une part, la transformation de ces espaces en logements sociaux aurait certainement été extrêmement coûteuse par rapport au prix du foncier ; d’autre part, il n’y a pas de raison de ne pas appliquer les obligations de logement social dans le septième arrondissement.
Pour le ministère, cela entraînera des discussions sur le prix de l’immeuble. Ce prix ne dépendra pas que du logement social, mais du projet d’ensemble. Lorsque nous lancerons un appel d’offres avec France Domaine sur l’îlot Saint-Germain, nous demanderons que les investisseurs présentent de véritables projets. Ensuite, tout dépendra de la façon dont le projet retenu s’organisera. Le logement social ne concernera qu’une partie de l’emprise, pas sa totalité. C’est une question de valorisation globale de l’emprise. Je ne sais pas ce qu’il en sera et sans connaître la nature des projets proposés, on ne peut pas dire aujourd’hui qu’il y aura une décote et évaluer le montant de cette décote. Il faut donc attendre les projets présentés par les investisseurs.