Le 1er août dernier, Philippe FOLLIOT a posé une question écrite à Monsieur Nicolas HULOT, Ministre de la transition écologique et solidaire sur la réunion d’information et d’échanges sur le loup tenue le 22 juin 2017. Il souhaitait, alors que la présence du loup augmente dans notre pays, que lui soient communiquées les mesures à l’étude pour une meilleure adaptation de l’arsenal français de lutte contre les dégâts engendrés par le loup et pour une plus juste reconnaissance des préjudices endurés par les éleveurs.
Le 24 octobre dernier, Monsieur le Ministre lui a répondu. Vous trouverez ci-dessous le texte de cette question écrite et de la réponse reçue.
Texte de la question
Philippe Folliot attire l’attention de M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la réunion d’information et d’échanges sur le loup tenue le 22 juin 2017 et coorganisée avec le ministère de la transition écologique et solidaire. L’objectif de cette réunion était de travailler sur l’élaboration du prochain plan national loup et de fixer le nombre de loups dont le prélèvement sera autorisé pour la période du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 de manière concertée avec les acteurs dont l’activité est impactée par la prédation des loups. Or ceux-ci expriment un désaccord avec les annonces formulées à cette occasion. Ils estiment leur activité menacée par la fixation d’un plafond de loups à prélever à 40 ou encore par la suppression des tirs de prélèvement au-delà de 30. Ces annonces ne permettront pas d’aboutir à l’objectif affiché par les représentants de la profession agricole de zéro attaque sur les troupeaux. Alors même que l’ONCFS atteste d’une augmentation des attaques sur troupeaux et d’une croissance du nombre de meutes de 20 % et de la population de loups de 22 % en France, les éleveurs attendent que soient davantage pris en compte leur détresse, leur expérience ainsi que les efforts déjà consentis de leur part. Face à l’élargissement du territoire de présence du loup et donc de sa capacité de nuisances, il souhaiterait donc que lui soient communiquées les mesures à l’étude pour une meilleure adaptation de l’arsenal français de lutte contre les dégâts engendrés par le loup et pour une plus juste reconnaissance des préjudices endurés par les éleveurs.
Texte de la réponse
La réunion d’échange et d’information sur le loup qui s’est déroulée le 22 juin dernier à Lyon est une instance de communication, de travail et de discussion entre tous les acteurs concernés, portant sur les axes de gestion de la présence du loup en France. Les services du ministère y entendent tant les demandes du monde agricole, qui visent un objectif de zéro attaque sur les troupeaux, que celles des associations de protection de l’environnement, qui revendiquent zéro destruction de loup. Ils y présentent les bilans de suivi de population, de dommages et d’indemnisation, ainsi que des demandes de mesures de protection. Les projets de textes réglementaires et les propositions d’orientation tirées de la démarche prospective loup à l’horizon 2025/2030, lancée en 2016, y sont également discutés. A l’issue des différents échanges conduits lors de ces réunions, il revient néanmoins aux ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture de prendre, de façon concertée, les décisions adaptées, en se fondant notamment sur les dernières données scientifiques disponibles. Le Gouvernement est tenu de respecter les obligations de protection du loup, qui est inscrit dans la convention de Berne et la directive 92/43/CEE dite « Habitats-Faune-Flore ». Cette protection implique un bon état de conservation de la population, qui ne doit pas régresser, et une expansion de son territoire dans tous les habitats qui lui sont favorables. Si la population de loup connaît une augmentation régulière depuis son retour naturel en France en 1992, les résultats de l’expertise collective biologique rendus publics en février 2017 montrent cependant que cette population est encore fragile en France et doit faire l’objet d’une gestion adaptative afin de ne pas nuire à son développement. De fait, la possibilité de réaliser des tirs de destruction est limitée : les ministres prennent en compte le suivi de la population réalisé deux fois par an par l’office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) pour fixer un seuil annuel de destruction qui ne remette pas en cause le bon état de conservation de la population de loup. Dès lors, les solutions alternatives doivent être privilégiées : la pertinence des mesures de protection des troupeaux s’impose dès que le loup est présent sur un territoire. L’étude Terroïko menée en 2016 par un bureau d’études indépendant a conclu à l’efficacité de ces moyens de protection notamment lorsqu’ils sont cumulés (chien et aide-berger ou clôture et aide-berger, par exemple). Les plans nationaux d’action loup prévoient d’ailleurs le financement de moyens de protection. Face à l’augmentation de la prédation, le ministre a souhaité une révision de la politique de gestion de la présence du loup. En se basant sur les travaux de la démarche prospective lancée en 2016, une réflexion favorisant le dialogue et le développement d’une vision de coexistence entre la présence du loup et le pastoralisme durable est menée afin d’explorer les pistes permettant de développer cette co-existence de manière plus sereine. L’objectif est d’aboutir à un nouveau plan national pour le loup qui, dès 2018, apportera des solutions nouvelles et une approche innovante. Par la suite, des études continueront à alimenter la réflexion et à approfondir la politique mise en œuvre afin de parvenir à l’équilibre entre protection du loup et soutien du pastoralisme.
Peu satisfait de ces éléments d’informations complémentaires, et à l’initiative de Mme Pascale BOYER, députée LREM des Hautes-Alpes, Philippe FOLLIOT et une vingtaine d’élus de la majorité de zone montagne ont signé une tribune relayée dans la presse nationale et locale demandant un plan de gestion de la population lupine française plus ambitieux et respectueux des équilibres fragiles entre maintien de cette espèce et activités pastorales.
Le texte de cette tribune est à retrouver ci-dessous :
La ruralité, l’agropastoralisme, et l’équilibre des territoires : nos priorités
Le projet de plan d’action national sur le loup et les activités d’élevage 2018-2023 soumis à consultation publique a une finalité ambitieuse et nécessaire : concilier la préservation de l’agropastoralisme et la présence du loup sur nos territoires. Si nous souscrivons à cet objectif, nous appelons les pouvoirs publics à accorder au sujet du loup toute l’importance qu’il a pris sur nos territoires.
Devenu un marqueur de la prise en compte et de la compréhension de nos territoires ruraux par les gouvernants, la présence du loup en France ne concerne plus uniquement la filière de l’élevage, directement et terriblement exposée, mais bien l’ensemble des acteurs du monde rural. La dimension systémique des problèmes causés par le loup est réelle : entretien et équilibre des territoires, dégradation des espaces, activités touristiques menacées par la présence de Patous et des autres races de chiens de troupeaux, prolifération de nuisibles comme le sanglier en raison de la réduction du nombre de troupeaux, attaques élargies à d’autres animaux, rapprochement du loup ou de ses hybrides des zones d’habitations etc.
L’élaboration et la mise en œuvre du plan loup ne peuvent donc être envisagées indépendamment de la déclinaison d’une véritable politique du territoire portée et assumée par la nation tout entière. Une réponse globale au monde rural permettra d’atteindre un nouvel équilibre qui intègre la survie des différents prédateurs.
Quelques propositions fortes nous semblent indispensables.
Rétablir la confiance
Ce que nous observons sur nos territoires est unanime : la méfiance tantôt, vis-à-vis de ceux qui comptent les loups, des études menées, ou des décideurs. La condition préalable à la réussite du plan est de restaurer une relation de confiance entre tous les acteurs : éleveurs, services de l’Etat, acteurs des territoires, au niveau central comme au niveau déconcentré.
La confiance retrouvée exige la reconnaissance de deux vérités :
- le pastoralisme participe directement à la préservation de la biodiversité, des paysages et de l’identité des territoires ainsi qu’au développement d’une économie écoresponsable.
- la prédation du loup figure parmi les menaces qui pèsent, à moyen terme, sur la survie de l’activité pastorale.
Elle suppose également de :
- se doter d’un référentiel commun, transparent, et partagé, pour le comptage des loups, la conduite d’études, et le suivi des décisions prises. L’objectif d’atteindre 500 loups sur le territoire a déclenché une forte inquiétude. Les méthodes de comptage sont contestées et ne recueillent pas le niveau de confiance nécessaire pour une gestion apaisée de la population lupine. L’adoption de techniques scientifiques fiables est un préalable à la conduite de toute politique publique.
- reconnaître le préjudice psychologique postérieur à une attaque de loup et pérenniser l’inconditionnalité des indemnisations : parmi tous nos concitoyens, les éleveurs sont les premiers à subir les conséquences psychologiques et économiques de la prédation, de manière aigüe et permanente. Ils n’ont pas à en supporter seuls les coûts. Le principe d’égalité devant les charges publiques impose que les risques entraînés par la politique de protection du loup soient assumés par la solidarité nationale. La conditionnalité des indemnisations n’est donc pas acceptable et la reconnaissance du préjudice psychologique faisant suite aux attaques est légitime. Nous en faisons deux questions de principe, deux préalables à la restauration de la confiance.
Décliner la confiance sur les territoires
La confiance ne suffira pas si elle n’est pas conjuguée aux exigences du pragmatisme et de la proximité.
La territorialisation de la gestion du loup est une nécessité. Des comités départementaux ou infra-territoriaux pourraient apporter des réponses adaptées et réactives aux conséquences directes et indirectes de la présence du loup, associant élus locaux, éleveurs, associations de protection et acteurs économiques concernés.
Un accompagnement individuel des éleveurs pour la conception et la mise en œuvre des mesures de protection serait susceptible d’accroître significativement leur efficacité. Il doit permettre aux professionnels de bénéficier des aides publiques en amont de l’installation des dispositifs de protection.
Enfin, l’adoption du principe de la gestion adaptative adopté par le nouveau plan doit se traduire par la remise de rapports d’évaluation réguliers à des entités territoriales représentatives rassemblant organismes professionnels, associations, services de l’Etat et élus.
Si les conditions présentées ci-dessus sont retenues, le plan loup, qui a déjà beaucoup évolué à l’écoute des différents acteurs, conserve toutes les chances d’aboutir à une gestion à la fois plus rationnelle, apaisée et efficace de la coexistence entre le pastoralisme et le loup sur les territoires.
Pascale Boyer, députée des Hautes-Alpes, Célia de Lavergne, députée de la Drôme, Françoise Dumas, députée du Gard, Frédérique Lardet, députée de la Haute-Savoie, Philippe Folliot, député du Tarn, Véronique Riotton, députée de la Haute-Savoie, Jean-François Eliaou, député de l’Hérault, Anne Blanc, députée de l’Aveyron, Annie Chapelier, députée du Gard, Emmanuelle Fontaine-Domeizel, députée des Alpes-de-Haute-Provence, Joël Giraud, député des Hautes-Alpes, Monique Limon, députée de l’Isère, Olivier Gaillard, député du Gard, Delphine Bagarry, députée des Alpes-de-Haute-Provence, Huguette Tiegna, députée du Lot, Barbara Bessot-Ballot, députée de la Haute-Saône, Jean-Bernard Sempastous, député des Hautes-Pyrénées, Monica Michel, députée des Bouches-du-Rhône, Mireille Robert, députée de l’Aude, Stéphane Mazars, député de l’Aveyron, Jean Terlier, député du Tarn, Alice Thourot, députée de la Drôme.
Les cosignataires entendent donc peser sur les arbitrages en cours quant au plan loup proposé par le ministre de la Transition écologique et solidaire, M. Nicolas HULOT.