La réforme constitutionnelle et celle de l’ordre du jour de l’Assemblée nationale a fait une plus large place au rôle de contrôle du Parlement. Ainsi une fois par mois un Ministre spécifique est interrogé par les députés sur sa politique durant plus de deux heures après la traditionnelle séance de questions au gouvernement.
Mardi 2 juin, c’est Christine Boutin, Ministre du Logement, qui s’est retrouvé sous le feu des questions parlementaires. Philippe Folliot, spécialiste des questions relatives au logement social et notamment au 1% logement, était bien sûr au rendez-vous pour faire part à la Ministre de ses inquiétudes sur l’avenir du 1% avec l’entrée en vigueur de la loi Boutin dont il avait combattu certains aspects.
Retrouvez ci-dessous le compte-rendu de leurs échanges:
“M. Philippe Folliot. Madame la ministre, nous n’allons pas refaire le match et reprendre les discussions et les débats assez passionnés que nous avons eus sur un sujet dont vous savez qu’il m’est particulièrement cher : je veux parler du 1 % logement, système de solidarité professionnelle qui a finalement plus ou moins bien fonctionné, et plutôt plus que moins, pendant plus d’un demi-siècle. À cet égard, un certain nombre de questions se posent sur lesquelles j’aimerais obtenir quelques éclaircissements de votre part, madame la ministre.
Les partenaires sociaux s’inquiètent tout d’abord du devenir du dispositif à moyen terme, ne s’agirait-il que de sa capacité de financement et de régénération puisque l’on sait que le 1 % repose sur des ressources nouvelles tirées de la collecte, mais aussi sur les retours de prêts. Pouvez-vous nous éclairer sur ces perspectives à moyen terme ?
Il est également quelque peu regrettable qu’il n’y ait pas eu un avis conforme des partenaires sociaux dans le cadre d’un réel échange de vues avec vos services, s’agissant, notamment, du décret qui sera présenté au Conseil national de l’habitat, le 8 juin prochain.
Des doutes existent aussi quant à la légitimité du système à moyen terme, car il n’y aura aucune marge de manœuvre pour les acteurs du 1 % logement. En effet, tous les emplois seront quasiment prédéterminés, avec une mise sous tutelle de fait des partenaires sociaux compte tenu des évolutions réglementaires en cours.
Enfin, les crédits prévus pour les prêts 1 % du renouvellement urbain, du fait du passage de 225 à 300 millions d’euros de subventions en faveur du plan de cohésion sociale, posent également problème.
Ma question est très simple, madame la ministre : quel est l’avenir du 1 % logement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Boutin, ministre du logement. Monsieur le député Folliot, la disposition de ma loi relative à la détermination des enveloppes des fonds du 1 %, sujet auquel je vous sais sensible, a fait l’objet d’une longue concertation avec les partenaires sociaux.
Il est vrai que nos relations avec les partenaires sociaux ont été…
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tumultueuses !
Mme Christine Boutin, ministre du logement. Non, pas du tout !
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Oh si !
Mme la présidente. Seule Mme la ministre a la parole !
Poursuivez, madame la ministre.
Mme Christine Boutin, ministre du logement. Il y a eu, s’agissant de ces enveloppes, une convergence de vues entre l’État et les partenaires sociaux. Je n’ai pas, quant à moi, rencontré de problèmes dans la rue avec le 1 % !
Nous avons été notamment particulièrement vigilants afin d’éviter, sur la période 2009-2011, des déséquilibres concernant le financement du 1 % logement.
Ainsi, sur l’ensemble de la période de trois ans, le déficit calculé pour chaque emploi sur la base de valeurs cibles pourrait représenter moins de 5 % des sommes collectées. Ce déficit est donc inférieur à la marge de 10 % fixée pour la détermination des fourchettes des enveloppes affectées aux différents emplois.
En tout état de cause, il est clair que de nouvelles concertations interviendront avec le 1 % avant la fin de cette période triennale, permettant notamment de réfléchir à l’avenir du dispositif.
En ce qui concerne le décret sur les emplois, monsieur le député, il a été naturellement, comme pour tout le reste, « calé » avec les partenaires sociaux.
Je dois d’ailleurs vous confier que les relations et les concertations que j’ai pu avoir s’agissant du 1 % logement me laisseront un souvenir agréable,…
M. Alain Cacheux. Pour vous oui, mais pas pour eux !
Mme Christine Boutin, ministre du logement. …ce qui n’est pas le cas avec tout le monde !
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Folliot, pour une minute.
M. Philippe Folliot. Il y a tout de même un certain décalage entre les propos que vous venez de tenir et la perception que peuvent avoir les partenaires sociaux de la nature des échanges et des discussions qui ont pu se tenir. Il y a eu, certes, des contacts, mais eux ont le sentiment qu’on leur a demandé de se plier à des arbitrages interministériels.
Au-delà de cela, la question de la légitimité même du 1 % logement sur le moyen terme me paraît essentielle. En effet, ce qui était, au départ, un outil de solidarité professionnelle devient de plus en plus une variable d’ajustement des politiques publiques du logement avec tout ce que cela comporte. À moyen terme, ce système posera aux entreprises un gros problème de légitimité vis-à-vis de leurs salariés.
Mme la présidente. La parole est Mme la ministre.
Mme Christine Boutin, ministre du logement. Monsieur Folliot, je tiens à vous dire que, contrairement à vous, député, je suis un ministre optimiste ! Je crois, pour ce qui me concerne, dans le 1 %.
M. Alain Cacheux. Évidemment, vous n’avez plus de ligne budgétaire !
Mme Christine Boutin, ministre du logement. Il y a eu plus de quinze heures de concertation entre les partenaires sociaux et moi. Nous sommes convaincus de la nécessité du 1 % que nous ne remettons absolument pas en cause. Si cela permet à tous les partenaires du 1 % d’être rassurés, je vous remercie de votre question, monsieur le député !
M. Alain Cacheux. Que ferez-vous dans trois ans, madame la ministre ?”