| 2 JAN. 2020 |
Au moyen de deux questions écrites, Philippe FOLLIOT a interrogé ces dernières semaines le ministre de l’Education nationale et de la Jeunesse Jean-Michel BLANQUER sur des problématiques relatives aux enfants les plus fragiles accueillis en milieu scolaire.
Dans cette question n°18682, le député de la 1ère circonscription du Tarn interrogeait le ministre sur la discrimination que représente l’application d’un tarif « enfant non-résident » en cantine scolaire pour les familles d’enfants scolarisés en ULIS hors de leur commune de rattachement, comme c’est souvent le cas pour les enfants résidant en zone rurale où il n’y a pas d’école ou pas de classe susceptible de les accueillir selon leur projet personnalisé de scolarisation. Rappelant les mécanismes financiers entre communes relatifs à la prise en charge des coûts de fonctionnements afférents à la scolarisation d’enfants non-résidents, le ministère a aussi mis en avant les recommandations de mai 2018 du Défenseur des Droits selon lesquelles appliquer un tarif non-résidents aux enfants scolarisés en ULIS représente une discrimination indirecte ainsi que son invitation faite à l’association des maires de France à procéder à un état des lieux en la matière afin de faire respecter l’égalité d’accès au service public.
Texte de la question
M. Philippe Folliot interroge M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse sur la tarification du service de restauration scolaire aux familles des enfants scolarisés en ULIS hors de leur commune de résidence. En mai 2018, le Défenseur des droits, suite à la saisine de plusieurs familles d’enfants handicapés, a rendu une décision contre la mise en place d’une discrimination indirecte pour les enfants inscrits en unité localisée pour l’inclusion scolaire (ULIS) et non-résidents de la commune où est située l’école accueillant la classe ULIS de scolarisation. Dans la mesure où les enfants scolarisés en ULIS n’ont pas le choix de l’école dans laquelle ils sont scolarisés puisque ni toutes les écoles ni toutes les communes ne prévoient tel accueil, l’application d’une tarification de cantine identique aux non-résidents à ces familles représente pour elle une double peine et une rupture du principe d’équité. Lassées de devoir se battre pour une égalité de droits effective, les familles des enfants scolarisés en ULIS dénoncent cette situation de fait. Sans remettre en cause le principe de libre administration des collectivités territoriales, il souhaiterait savoir ce qu’entend faire le Gouvernement afin de favoriser l’inclusion sociale et l’égalité des familles d’enfants handicapés dans le milieu scolaire et périscolaire au regard de cette décision du 17 mai 2018.
Texte de la réponse
Dans ses recommandations de mai 2018, le défenseur des droits indique que l’application du tarif extérieur aux enfants scolarisés en unité localisée pour l’inclusion scolaire (ULIS) constitue une discrimination indirecte en raison de leur handicap. Il recommande à l’association des maires de France de « faire un état des lieux » dans les cantines. La création d’une cantine scolaire relève de la compétence générale dévolue aux communes et répond à un intérêt public local. Cette création est facultative en vertu du principe de libre administration des communes. Dès lors que la cantine est créée par la commune, celle-ci doit respecter les grands principes du service public et notamment l’égalité d’accès au service. L’inscription à la cantine des écoles primaires est un droit pour tous les enfants scolarisés, conformément à l’article L. 131-13 du code de l’éducation. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille. Les articles R. 531-52 et R. 531-53 du code de l’éducation établissent que les prix de la restauration scolaire fournie aux élèves des écoles maternelles et des écoles élémentaires sont fixés par la collectivité territoriale qui en a la charge. L’article L. 112-1 du code de l’éducation précise que tout enfant en situation de handicap doit être inscrit dans l’école la plus proche de son domicile, qui constitue son établissement de référence. Néanmoins, dans le cadre de son projet personnalisé de scolarisation (PPS), si ses besoins nécessitent qu’il reçoive sa formation dans le cadre d’une unité localisée d’inclusion scolaire (ULIS), il peut être inscrit dans une autre école qui se trouve dans une commune différente de son lieu de résidence. Ainsi, lorsqu’un élève est scolarisé dans une commune autre que celle de sa résidence, un mécanisme de répartition des dépenses de fonctionnement se met en place entre les deux collectivités territoriales concernées. Le principe qui régit la répartition des dépenses de fonctionnement liées à la scolarisation d’un élève dans une autre commune est celui de la recherche d’un libre accord entre le maire de la commune de résidence et le maire de la commune d’accueil. En l’absence d’accord, il revient au représentant de l’État dans le département de fixer le montant de la contribution. Par exception, les dispositions de l’article L. 212-8 du code de l’éducation prévoient quatre autres situations dans lesquelles la commune de résidence est tenue de verser une contribution financière. • En premier lieu, la commune de résidence disposant d’une école élémentaire ou maternelle dont la capacité d’accueil permet la scolarisation des enfants domiciliés dans sa commune n’est tenue de participer aux charges de l’école d’accueil que si le maire a donné son accord préalable à la scolarisation hors de sa commune. • En second lieu, la commune de résidence est tenue d’assurer la charge financière de la scolarisation dans la commune d’accueil, même si sa capacité d’accueil est suffisante, lorsque l’inscription est justifiée par les obligations professionnelles des parents s’ils résident dans une commune ne proposant pas de service de garderie et de cantine scolaire. • En troisième lieu, la commune de résidence disposant d’une capacité d’accueil suffisante est tenue de contribuer aux frais de scolarisation supportés par la commune d’accueil en raison de l’état de santé de l’enfant justifiant son inscription dans une école de la commune d’accueil. • Enfin, le quatrième motif imposant le financement par la commune de résidence, même si elle dispose d’une capacité d’accueil suffisante, concerne l’inscription d’un frère ou d’une sœur dans un établissement de la commune d’accueil (si cette inscription est elle-même justifiée soit par les obligations professionnelles des parents et l’absence de moyen de restauration ou de garde, soit pour raisons médicales, soit en l’absence de capacité d’accueil dans la commune de résidence, soit en cas de droit de ce frère ou de cette sœur à la poursuite de son cycle scolaire entamé). Les cinq situations imposant la contribution financière de la commune de résidence résultent du 4e alinéa de l’article L. 212-8 du code de l’éducation. Ces dispositions juridiques de nature législative s’imposent aux maires ; dès lors ces derniers n’ont pas la possibilité de s’exonérer du paiement. En conséquence, il n’est pas possible pour le maire de la commune de résidence de s’exonérer du paiement en soumettant la scolarisation de l’enfant dans l’autre commune à la condition de ne pas verser de subvention. De même, le maire de la commune de résidence ne peut pas accorder une dérogation pour une scolarisation dans une autre commune tout en refusant la participation financière. Le Conseil d’Etat précise à cet effet qu’un « intérêt général s’attache à ce que les restaurants scolaires puissent être utilisés par tous les parents qui désirent y placer leurs enfants sans distinction selon les possibilités financières dont dispose chaque foyer » (CE 10 février 1993, Ville de La Rochelle).
Dans la question n°21741 suivante, Philippe FOLLIOT l’interrogeait sur la prise en compte par l’Education nationale des troubles anxieux scolaires afin de permettre aux enfants victimes de phobie scolaire de connaitre un parcours scolaire le moins perturbé possible. Dans sa réponse, le ministère affirme que les médecins scolaires et la communauté éducative sont de plus en plus confrontés à cette problématique dont la prise en compte et l’accompagnement progressent notamment grâce à une complémentarité entre accompagnement médicalisé et rescolarisation progressive et adaptée (heures de scolarisation, lieu d’apprentissage…). Des projets d’accueil individualisés, comprenant un taux de scolarisation adapté (et complété par un enseignement à distance via le CNED) aux enfants concernés après examen pédopsychiatrique, sont proposés, tout comme un accompagnement individualisé avec un AESH en cas de reconnaissance du caractère handicapant de la phobie. Par ailleurs, une circulaire APAD, qui prévoit les modalités d’accompagnement optimal et d’équité pour les enfants en ayant besoin, est en cours de réécriture, afin d’être étendue aux enfants victimes de troubles anxieux scolaires notamment. Enfin, le ministère rappelle qu’un certain nombre de documents est à disposition des enseignants et des intervenants scolaires pour les aider à prendre en compte les besoins particuliers de ces enfants.
Texte de la question
M. Philippe Folliot alerte M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse sur la prise en compte des troubles anxieux scolaires par l’éducation nationale. Chaque année, après avoir essayé de nombreuses méthodes adaptées et en dernier recours certains traitements médicamenteux, de nombreux élèves souffrant de phobie scolaire sont contraints d’être déscolarisés pour ne pas dégrader dangereusement leur état de santé mentale et physique. Subie par de nombreux enfants, la déscolarisation est souvent le dernier remède pour leur offrir une chance d’étudier. La déscolarisation devient alors une nécessité qui survient après avoir épuisé les options proposées par le système éducatif traditionnel. Pour le bien-être de ces enfants, une reconnaissance officielle des troubles anxieux scolaires par l’État et l’éducation nationale est réclamée par les associations défendant les enfants atteints de ces troubles et leurs familles. Or il semblerait que la loi pour une école de la confiance manque à leurs yeux de précisions quant aux méthodes pouvant être mises en place afin d’aider ces jeunes citoyens souffrant de phobie scolaire. Il souhaiterait donc connaître les nouvelles mesures qui seront prises pour mieux accompagner d’une part, les enfants atteints de phobie scolaire et d’autre part le corps enseignant qui, face à ces troubles, manquerait d’information et de formation.
Texte de la réponse
La direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) connaît et prend en compte la problématique des troubles scolaires anxieux, en augmentation depuis quelques années. Dans le cadre du recueil annuel des données de santé concernant les visites médicales systématiques et à la demande, la rubrique « troubles scolaires anxieux » a été ajoutée, depuis l’année scolaire 2016-17, dans les motifs d’assistance pédagogique à domicile (APAD) et de projet d’accueil individualisé (PAI). À titre d’exemple, sur l’académie de Lille pour l’année scolaire 2017-18, les « troubles scolaires anxieux » représentent 195 des 899 élèves ayant bénéficié d’une APAD et 26 des 62 élèves ayant bénéficié du Centre national d’enseignement à distance (CNED) réglementé. Sur la même année, dans l’académie de Dijon, 154 PAI sur les 6862 répertoriés concernent des « troubles scolaires anxieux ». Sur un département moyen comme l’Indre-et-Loire, en 2016, une centaine de jeunes étaient connus comme étant pris en charge pour cette problématique. Par ailleurs, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) réalise une étude sur le phénomène nommé par certains « phobie scolaire » dans le cadre d’une recherche citoyenne et participative à destination des familles. Lorsque la famille et les professionnels se mobilisent conjointement, il est tout à fait possible de rescolariser normalement la plupart de ces élèves. Les médecins de l’éducation nationale sont sollicités depuis quelques années pour accompagner ces jeunes en refus scolaire anxieux. Souvent ce sont eux qui établissent le diagnostic après avoir reçu l’élève et sa famille, et pris en compte son contexte scolaire. Ils adressent ensuite le jeune pour soin à un pédopsychiatre avec lequel ils évaluent au fil de l’évolution le degré de rescolarisation souhaitable. Chaque situation est étudiée au cas par cas, il n’existe pas de réponse unique. Pour prévenir l’installation durable des troubles, il n’est pas souhaitable d’ancrer le refus scolaire anxieux dans le champ du handicap. Il existe des dispositifs pour prendre en charge les enfants ayant ce type de troubles. Par ailleurs, les troubles anxieux scolaires peuvent toutefois aboutir à une situation de handicap et relèvent dans ce cas d’un accompagnement dans le cadre de l’école inclusive. Les dispositifs mis en place par l’éducation nationale pour les troubles anxieux scolaires passent par les projets d’accueil individualisés (PAI), comme pour tout problème de santé. La circulaire n° 2003-135 du 8 septembre 2003 qui les organise est en cours de réécriture, avec une publication prévue sur l’année 2019-20, notamment afin de mieux répondre à ce type de besoins des élèves. Il s’agit de repérer les symptômes le plus tôt possible, de sensibiliser et former les personnels des équipes éducatives et d’éviter la déscolarisation ou de rescolariser le plus rapidement possible. En effet, la déscolarisation aggrave le retrait social et les difficultés. Cependant, une rescolarisation sans soin est souvent vouée à l’échec. De nombreux médecins conseillers techniques départementaux se sont emparés de cette problématique et insistent sur la nécessité d’un soin approprié parallèlement à la démarche de rescolarisation, dès le début des symptômes. Pendant la phase de rescolarisation, qui est progressive, une assistance pédagogique « à domicile » (c’est-à-dire sur tout lieu où l’élève malade peut bénéficier d’un enseignement) peut être proposée. La circulaire APAD, également en cours de réécriture, devrait être étendue comme dispositif d’accompagnement pédagogique à domicile, à l’hôpital et à l’école. L’APAD est accessible et proposé aux élèves qui en ont besoin, dans un souci d’accompagnement optimal et d’équité. Il est parfois nécessaire de le commencer dans un lieu neutre en dehors de l’école, comme par exemple dans une bibliothèque municipale, si possible avec un enseignant de la classe pour favoriser le lien et le retour, puis au sein de l’établissement dans une pièce isolée par exemple et enfin en complément d’un retour partiel en classe. En quelques semaines ou mois, le jeune va pouvoir reprendre l’ensemble de ses cours en classe tout en poursuivant le soin autant que de besoin. Dans les cas sévères ou diagnostiqués tardivement il faut parfois 2 ans pour ce résultat. Dans les cas les plus complexes, une hospitalisation peut être nécessaire, avec un recours à des dispositifs plus lourds comme le soin-études. Le CNED peut être envisagé pour accompagner temporairement l’élève lorsque la scolarisation ordinaire est impossible. Il est recommandé d’avoir recours au CNED partiel et non au CNED complet afin de maintenir d’emblée un lien entre l’élève et l’école. Le CNED partiel pourra compléter les aides mises en place dans le cadre du PAI. Enfin, le pôle inclusif d’accompagnement localisé (PIAL) est un dispositif permettant un accompagnement par aide humaine des élèves en situation de handicap pour développer leur autonomie et faciliter leur acquisition de toutes les connaissances et les compétences du socle commun. Dans les cas de troubles scolaires anxieux les plus sévères associés à d’autres troubles handicapants, l’élève peut bénéficier de ce dispositif si la MDPH estime que l’aide d’un accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH) s’avère pertinente. Les équipes pédagogiques et les personnels ressources que sont les psychologues, les infirmiers et les médecins de l’éducation nationale, bien sensibilisés à ce sujet, sont les mieux placées pour trouver, avec la famille et l’élève, l’accompagnement le plus adapté. Des guides académiques sur le refus scolaire anxieux et la plateforme « Cap école inclusive » qui intègrera cette dimension prochainement, sont à leur disposition pour les aider à répondre aux besoins particuliers des élèves.