| 8 JUIN 2020 |
L’acte de naissance de la République Française est le 21 septembre 1792. Son histoire a été mouvementée, pleine de pérégrinations, ces allées et venues, pendant près d’un siècle, pour s’installer durablement en 1875 et, hormis le funeste intermède de la Seconde Guerre mondiale, elle subsiste aujourd’hui sous sa cinquième version.
La République est-elle insubmersible et définitive ? Malheureusement non, elle s’est déjà effondrée en 1940, en quelques semaines elle a été discréditée, enfoncée, emportée. Le naufrage peut être soudain, massif, brutal, mais la mort de la République peut être subreptice, lente, indolore.
En fait, mes propos méritent une importante clarification. Pour moi, République Française se conjugue avec démocratie, sous l’égide de sa devise Liberté Egalité Fraternité. Cette précision est utile et fondamentale à faire car il existe à travers le monde des royaumes ou empires parfaitement démocratiques et des républiques parfaitement populistes ou dictatoriales. Par un pacte multiséculaire, la France a marié République avec démocratie et liberté… Aujourd’hui c’est ce bien commun qu’il nous faut préserver.
La France, la République, la République Française, peut être attaquée de l’extérieur par un adversaire étranger ou multinational, affiché ou caché donc étatique ou terroriste… Pour cela, nous disposons de moyens pour nous défendre au travers de nos forces armées et de nos valeureux militaires qui, au péril de leur vie, assument des missions de défense et protection du pays et donc de la République qu’ils servent.
La République peut être attaquée de l’intérieur aussi, par quelques factieux, extrémistes ou djihadistes qui remettent en cause nos valeurs, notre modèle, nos principes, notre démocratie, nos institutions… C’est pour cela qu’il ne faut pas faiblir, qu’il ne faut pas faillir quand les symboles sont attaqués, qu’ils soient mémoriels ou intemporels, comme le drapeau, l’hymne, la devise, la laïcité… Je crois que l’éducation est fondamentale par rapport à tout cela, et nous devons être fermes sur la question des apprentissages fondamentaux bien entendu, mais sociétaux aussi. Quand on voit dans certaines écoles la mixité remise en cause, l’égalité des sexes puis les droits des filles bafoués, cela révolte et la République se doit d’être ferme dans ses réponses. En effet, la laïcité, par la loi du 9 décembre 1905 dite de séparation des églises et de l’Etat qui fut si clivante à l’époque, fait aujourd’hui partie de notre bien commun, de notre patrimoine commun. Il est des acquis que, faute de pouvoir les exporter, nous devons veiller activement à les préserver, à les sauvegarder, à les défendre comme la prunelle de nos yeux.
La République peut aussi être attaquée d’en haut, du sommet de l’Etat, et ce qui se passe depuis quelques temps aux Etats-Unis interroge, interpelle, inquiète aussi. Quand un populiste arrive au pouvoir, démocratiquement certes, la République encourt de graves dangers, ou tout au moins l’esprit républicain qui est fait d’une dose de tempérance, de reconnaissance, de bienveillance mais aussi de respect de la liberté de la presse, des corps intermédiaires, des oppositions…
Notre pays, notre chère France, bénéficie de longs et précieux acquis en la matière, mais aussi et surtout d’un Etat de droit qui fait que l’arbitraire est jugulé. Nous devons être prudents, notamment dans le respect des équilibres entre sécurité et liberté où, trop souvent, ces arbitrages ont été faits systématiquement en défaveur de cette dernière. Nous nous dotons d’outils juridiques sécuritaires toujours plus forts mais si demain le pouvoir tombait dans des mains mal intentionnées, la République ou tout au moins notre esprit républicain pourrait être bafoué voire remis en cause.
De par mes fonctions internationales à l’Assemblée, j’ai souvent pu me rendre compte, vu de l’étranger, que notre modèle parfois si décrié ici est apprécié, envié, respecté… vu d’ailleurs.
« Ce soir, nous célébrons la République. Nous la célébrons comme chaque fois dans l’histoire qu’elle a remporté une victoire. Comme toujours, face à l’épreuve, la voilà debout, fière, fidèle à ses valeurs, présente, forte, rassemblée ». Ainsi s’exprimait Jacques CHIRAC place de la République à Paris le soir du deuxième tour de la présidentielle de 2002. Puissions-nous la célébrer dans les mêmes termes… tous les jours !