Le Monde tremble
Le monde tremble et le bruit des bottes résonne un peu partout autour de nous et, pour la première fois depuis longtemps en Europe, avec une confrontation directe entre deux États : la Russie qui agresse l’Ukraine au mépris du droit international. Par courrier adressé à la présidence en ce jeudi 24 février 2022, j’ai demandé une réunion d’urgence du bureau de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN suite à l’annonce russe de l’invasion de l’Ukraine. Point de situation, définition de mesure de soutien à l’Ukraine et défense de nos valeurs démocratiques et du respect du droit international, c’est là le sens de mon engagement à l’AP OTAN.
Revenons un peu en arrière. Après la chute du mur de Berlin, nous avions certainement trop rapidement et trop naïvement pensé toucher les dividendes de la paix et imaginé que nous irions vers un monde sans conflit majeur et avec une inexorable progression de nos idéaux démocratiques. Malheureusement il n’en est rien. Le monde est toujours plus instable et dangereux !
Que ce soit dans ces éditoriaux, dans l’hémicycle à l’Assemblée puis au Sénat, au sein de l’Assemblée Parlementaire de l’OTAN, en commission, en missions ou sur le terrain des OPEX, j’ai souvent et régulièrement eu l’occasion de m’exprimer sur ces sujets.
La seule et vraie question qui sous-tend tous ces conflits et tensions c’est l’opposition entre une vision du monde démocratique, multilatérale basée sur le respect du droit international face à des visions autoritaires, dictatoriales, unilatérales et nationalistes, où le fait accompli l’emporte sur la force du droit.
Je ne dirai rien de plus original de ce que vous savez, de ce que vous sentez sur la situation en Ukraine. Sur les traces des Tsar et du régime soviétique, Vladimir Poutine déroule une stratégie implacable visant à avancer, à pousser coûte que coûte la restauration d’une forme de « Grande Russie ». Force est de constater que nos mots, nos sanctions n’ont jusqu’à présent eu que trop peu d’effets.
La question de la souveraineté d’un pays, l’Ukraine, la question de sa liberté d’adhérer à une organisation internationale, l’OTAN, sont au cœur du sujet. Bien entendu, je me suis associé à la déclaration du bureau de l’AP OTAN pour condamner l’agression dont est victime l’Ukraine.
Ma vision, c’est que c’est dans les moments difficiles qu’il faut savoir donner des signes tangibles. Bien entendu, l’Ukraine n’est pas encore membre de l’OTAN et ne peut bénéficier de l’article 5 donc de l’assistance mutuelle en cas d’agression mais il n’en est pas de même pour nos alliés baltes, polonais, slovaques, hongrois ou roumain en 1ère ligne. C’est le sens du programme de réassurance récemment renforcé avec une présence de forces notamment françaises chez nos amis baltes que j’avais visité il y a trois ans.
Si l’invasion de l’Ukraine par la Russie a commencé au Donbass, elle se poursuit avec les destructions préventives de moyens de défense et la prise de contrôle de centres névralgiques : je pense au-delà de l’affrontement massif, Poutine continue d’avancer les pions l’un après l’autre et l’attaque est vraisemblablement une déstabilisation asymétrique pour avoir les conditions d’une intervention d’encore plus grande ampleur quand selon lui le fruit sera mûr !
« L’ours russe » est pourtant économiquement faible. Il ne pèse pas plus que l’Espagne qui compte trois fois moins d’habitants. Ces ressources principales sont les exploitations de pétrole et gaz, de blé et… d’armes !
En fait, la grande peur de Poutine c’est que la démocratie ukrainienne soit contagieuse pour la Russie elle-même et prendre ses adversaires de revers en l’occurrence par le sud au Sahel est une stratégie murement pensée et réfléchie… vieille comme le monde ! Comme si cela ne suffisait pas, après la Syrie et la Lybie, la Russie avance ses pions en Afrique, en RCA et au Mali avec son faux nez la société militaire « privée » Wagner !
La question de l’on peut légitimement se poser c’est jusqu’où va-t-on aller et jusqu’à quand avant que nous réagissions de manière efficace car les sanctions n’ont jusqu’à présent pas été très efficaces !
Ce qui fait, in fine, la force des démocraties c’est cette capacité des peuples à adhérer à un projet et à un dessein, pour ne pas dire un destin collectif, qui est assumé et non pas imposé ! S’il faut donc assumer nos valeurs, il faut aussi avoir le courage de monter au créneau, d’avoir les moyens militaires adéquats pour peser dans la défense de nos principes communs et de nos intérêts. C’est par l’affirmation mais aussi et surtout par l’action que nous pourrons peser dans les affaires du monde pour que la peur change de camp et que les tyrans… tremblent !
Amitiés,
Philippe Folliot