Le sénateur achève les auditions dans le cadre du Protocole à la convention de Londres et présente son rapport à la Commission

L’une des missions du Parlement au titre de la Constitution (article 53) est la ratification de certains traités internationaux. Dans ce cadre, des députés et sénateurs sont désignés après la signature des conventions internationales pour préparer des rapports d’information qui rendent compte du contenu des accords et des potentielles problématiques liées. Fin 2024, Philippe Folliot avait été désigné rapporteur par la Commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées d’un amendement au Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers.

Le mercredi 22 janvier 2025, il a présenté son rapport lors d’une réunion de la Commission dont voici le compte-rendu analytique :

Projet de loi autorisant la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l’article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et autres matières – Examen du rapport et du texte de la commission

M. Philippe Folliot, rapporteur. – Nous examinons aujourd’hui le projet de loi autorisant la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l’article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et autres matières.

Cet amendement, qui date déjà de 2009, est important à plusieurs titres.

D’abord parce qu’il traite d’un sujet environnemental relatif à la protection des océans, soit de 70% de la surface du globe.

Ensuite, parce qu’il fait partie des outils à notre disposition pour atteindre l’objectif de décarbonation.

Enfin, car il pose de véritables questions liées à la souveraineté nationale en matière d’enfouissement de notre CO² résiduel, puisque la France ne dispose pas à ce jour de zones de stockage opérationnelles.

La Convention de Londres relative à l’immersion de déchets en mer de 1972 est l’une des premières conventions internationales en matière d’environnement. Elle est entrée en vigueur en 1975 et est administrée par l’OMI depuis 1977.

La Convention de Londres interdit l’immersion de certaines matières dangereuses et subordonne l’immersion des autres matières à la délivrance préalable d’un permis.

En 1996, les parties ont adopté un Protocole à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets (connu sous le nom de Protocole de Londres), qui a été ratifié par la France en 2006 et entré en vigueur la même année.

Le Protocole est destiné à remplacer la Convention de 1972. Au lieu de préciser les matières qui ne peuvent pas être immergées, il interdit l’immersion de tous les déchets, à l’exception de ceux dont l’immersion est autorisée et qui figurent sur la « contre-liste », dans une annexe du Protocole.

Il souligne l’ « approche de précaution », et dispose également que « le pollueur devrait, en principe, assumer le coût de la pollution ».

Le Protocole de 1996 inverse la logique : seule est autorisée l’immersion des déchets et matières énumérés dans une annexe.

L’annexe a été complétée en 2006 en ajoutant à la liste les flux de CO² provenant des processus de captage du CO².

En effet, la capture du CO² est apparue comme une solution pour réduire les émissions vers la fin des années 2010.

Les accords de Paris de 2015 adoptés lors de la Cop 21 prévoit la limitation des émissions de gaz à effet de serre.

Au niveau national, la stratégie bas carbone fixe une trajectoire de réduction des émissions, avec un objectif d’une diminution de 35% en 2030 et de 80% d’ici 2050 par rapport à 2015.

L’Union européenne a également adopté en 2019 un objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050.

Il est alors apparu que pour atteindre cet objectif ambitieux, la capture du CO² serait utile pour traiter du CO² dit « résiduel ».

Le CO² résiduel est celui que l’on ne peut pas supprimer de la chaîne de production, notamment dans les industries cimentière et chimique et pour l’acier.

Il est dès lors possible de capter le CO² émis, de le liquéfier afin de rendre son transport possible, puis, de l’enfouir dans diverses zones géologiques favorables (anciens réservoirs d’hydrocarbures, aquifères salins) qui peuvent se trouver sur terre ou en mer.

Les techniques existent et ont montré leur efficacité. Certains États sont plus en avance que d’autres.

Bien que la France soit excellente en matière de recherche puisque le CEA est leader sur les brevets liés aux technologies bas-carbone et l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles au 4ème rang mondial, aucune étude à ce jour n’a été lancée pour rechercher en France des zones off-shore destinées au stockage de CO².

En revanche, deux zones ont été repérés pour l’enfouissement du CO² : l’un dans le bassin parisien et l’autre dans le bassin aquitain.

En Europe, les plus avancés en matière de stockage, sont la Norvège, le Danemark, le Royaume-Uni, l’Islande et dans une moindre mesure l’Italie et la Grèce.

Le développement de cette technologie est subordonné à sa viabilité économique. En effet, les investissements nécessaires sont importants. Les industriels doivent être suffisamment incités pour y mettre les fonds nécessaires. En particulier, le marché du carbone fixe le prix du quota à environ 65 euros la tonne. C’est insuffisant. On estime qu’il devrait être porté à 120 euros d’ici 2030.

Il faudrait aussi que l’État accompagne le développement de ces projets, notamment dans le cadre du plan France 2030.

En effet, pour être intéressante, la zone de stockage doit disposer d’une capacité suffisante et se trouver à proximité des sources d’émission afin de limiter les coûts liés au transport.

À ce jour, la France n’a d’autre solution que d’exporter son CO² liquéfié vers d’autres États riverains, en particulier en mer du Nord (Danemark, Norvège et Pays-Bas).

C’est tout l’intérêt de cet amendement qui permet justement d’exporter le CO² vers d’autres pays disposant de capacités de séquestration géologique sous-marine.

Il n’entrera en vigueur que lorsque les deux tiers des Parties, soit 38 États, l’auront ratifié. Or, à ce jour, seuls 12 États l’ont fait. Il est donc urgent que la France autorise l’approbation de cet amendement, avant que se déroule la 3ème Conférence des Nations unies sur l’Océan à Nice, en juin prochain.

La France pourra alors donner l’exemple. De plus, la ratification de cet amendement permettra de faire avancer la recherche et de sécuriser les accords bilatéraux qu’elle pourra alors conclure.

Pour mener à bien ce rapport, j’ai eu plusieurs auditions : des représentants de l’Ademe, l’Ambassadrice de France auprès de l’OMI, le Gican, le Ministère de la Transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques, le Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, le Cluster maritime et enfin l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles.

Mes chers collègues, compte tenu de ces éléments, je vous propose d’approuver ce texte, qui, vous l’aurez compris, constitue le préalable à l’exportation d’une partie du CO² émis sur notre territoire.

Son examen en séance publique au Sénat devrait se tenir dans les semaines à venir.

Mme Michelle Gréaume. – La commission du développement durable a-t-elle été saisie de ce texte ? le sujet est très technique. Connait-on les chantiers en cours ? Comment les entreprises prendront-elles en charge ces nouveaux coûts ? Quelles aides incitatives peuvent être mises en place ?

M. Philippe Folliot, rapporteur. – La commission du développement durable ne s’est pas saisie pour avis de cette convention.

Au travers des très nombreuses auditions que j’ai menées, j’ai essayé de rentrer dans le détail de ces techniques que je ne maîtrisais pas du tout. C’était très intéressant. J’ai pu constater l’excellence de la recherche française en matière de captation de CO².

Quant au modèle économique, il reste à trouver. La difficulté est liée au prix du quota qui est insuffisant pour équilibrer ce modèle économique. Le risque est que les industriels aient plus intérêt à payer des taxes que de réaliser les investissements nécessaires.

En tout état de cause, capter le carbone c’est une chose, mais il faut aussi avoir la capacité de le stocker, si possible sur le sol national et de manière sûre. Si le France est très compétente sur le procédé de liquéfaction à la source, il faut ensuite le transporter.

Je me suis demandé si les méthaniers nous livre du gaz naturel ne pourraient pas repartir chargés de CO², mais ce n’est pas possible en raison de conditions de transport très différentes. Par contre, la France dispose d’industriels capables de construire es navires pouvant transporter du CO².

M. Jérôme Darras. – Je voulais porter à la connaissance de mes collègues qu’il y a dans mon département deux entreprises qui ont un projet commun de captation de carbone et de transfert au port de Dunkerque pour être immergé au large de la Norvège.

Le rapport est adopté à l’unanimité.

Le sénateur achève les auditions dans le cadre du Protocole à la convention de Londres et présente son rapport à la Commission