Philippe FOLLIOT a interrogé Monsieur Laurent FABIUS, Ministre des affaires étrangères, lors des questions d’actualité du mardi 9 juillet sur la situation en Egypte. Alors que l’armée égyptienne, soutenue par une large majorité de la population et un élan populaire, a pris les rênes du pouvoir, Philippe FOLLIOT, Président du groupe d’amitié France-Egypte à l’Assemblée nationale, a fait part de son sentiment d’inquiétude quant à la fracturation croissante de la société égyptienne. Il a rappelé la position stratégique de l’Egypte, berceau d’une des plus belles civilisations et confluent des trois mondes (africain, arabo-musulman et méditerranéen). Alors que les deux camps de la révolution du 30 juin subissent des pertes et des massacres, ce pays clé doit faire face à ces troubles et se doit d’organiser au plus vite des élections législatives, qui auront pour but de légitimer à terme un nouveau gouvernement. C’est la raison pour laquelle il a interrogé le Ministre sur le rôle que doit jouer la France pour éviter d’accroître l’instabilité dans cette région et aider à l’instauration d’élections démocratiques, et sur l’action de notre pays en faveur de la protection à la fois de nos intérêts et de nos ressortissants.
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M. Philippe FOLLIOT. Monsieur le ministre des affaires étrangères, l’Égypte est au bord du chaos, à deux doigts de la guerre civile. Au nom du groupe d’amitié France-Égypte de l’Assemblée nationale, que j’ai l’honneur de présider, je veux vous faire part de nos plus vives inquiétudes sur la situation dans le pays, préoccupations du reste partagées par mes deux prédécesseurs, Patrick Bloche et Hervé Gaymard, que je tiens à saluer. L’heure est grave : des massacres ont eu lieu, les morts se comptent déjà par dizaines dans les deux camps d’une société divisée, fracturée. Ce face-à-face, c’est le choc des légitimités entre un président islamiste démocratiquement élu, mais qui a déçu, et une opposition portée par l’élan populaire de la révolution du 30 juin, qui réclame en vain des élections législatives depuis plus d’un an. Face à cette situation chaotique, l’armée, institution incontournable et puissante, vient de prendre les rênes du pouvoir. L’Égypte, puissance majeure de la région, a des relations historiques et ancestrales avec la France ; elle est mère d’une des plus belles civilisations qui soient. C’est un pays clé, car à la confluence de trois mondes : les mondes africain, arabo-musulman et méditerranéen. Au-delà d’un appel au respect des institutions, à la tenue rapide d’élections, à la paix, au calme et à la retenue, quelles actions la France compte-t-elle mener pour aider l’Égypte à surmonter cette grave crise ? Nous ne pouvons en effet nous permettre l’ouverture d’un nouveau pôle d’instabilité si près de chez nous. Par ailleurs, monsieur le ministre, pouvez-vous informer la représentation nationale des mesures que vous comptez prendre si la situation vient à empirer et à dégénérer pour protéger nos intérêts et nos ressortissants ? Envisagez-vous notamment d’évacuer nos compatriotes si besoin est ?
M. Laurent FABIUS, ministre des affaires étrangères. Monsieur FOLLIOT, vous avez décrit d’une façon malheureusement juste la situation. Pour répondre à la dernière partie de votre question, sachez que, bien évidemment, les dispositions sont prises dès aujourd’hui pour renforcer la protection de nos entreprises et faire en sorte que tous nos concitoyens qui sont recensés sur le territoire égyptien soient prévenus. La France a également pris des dispositions pour assurer la protection des bâtiments égyptiens. Votre question porte, au-delà de ces considérations de sécurité, sur la situation égyptienne. Comment la résumer en un mot ? La réalité, ce sont les violences, et l’urgence c’est, au contraire, le rassemblement. C’est autour de ces deux idées que la France a rappelé sa disponibilité. Concernant les violences, vous l’avez rappelé, plus de cinquante morts ont été recensés lundi. Il faut qu’il y ait une enquête ; ces violences sont inacceptables. De l’autre côté, l’appel au soulèvement l’est tout autant. Le rassemblement, c’est ce que nous demandons à chacun, en particulier au nouveau président, au Gouvernement, de façon que les élections soient rapidement organisées et qu’on retrouve un chemin démocratique. Voilà ce qui est conforme à la tradition de la France. J’ai fait connaître aux nouvelles autorités égyptiennes, en particulier au ministre des affaires étrangères, notre disponibilité et j’ai l’intention de prendre contact, ainsi que le Président de la République me l’a demandé, avec le nouveau président égyptien. Ces deux thèmes – refus de la violence, nécessité du rassemblement – sont conformes à la fois à la tradition de la France et aux intérêts supérieurs de l’Égypte qui, comme vous l’avez rappelé, est un grand pays dont il faut assurer autant que possible la stabilisation.