| 5 NOV. 2019 |
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020, la commission de la Défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale recevait, le jeudi 10 octobre dernier, le Général Richard LIZUREY, Directeur général de la Gendarmerie.
A cette occasion, Philippe FOLLIOT a pris la parole sur de nombreux points. En effet, après avoir remercié et félicité l’ensemble des forces de gendarmerie en particulier les forces mobiles extrêmement sollicitées depuis de nombreuses années, il a souhaité interroger le Directeur général sur l’état d’avancée de la brigade de gendarmerie de Lacaune, projet évoqué depuis maintenant 17 ans.
Au-delà, il a abordé la question des véhicules blindés à roue de la gendarmerie (VBRG), conçus à la fin des années 1960, dont aujourd’hui seuls 30% sont opérationnels, et a demandé s’il était toujours envisagé de reprofiler des véhicules de l’avant blindés (VAB) afin de pallier le manque.
Enfin, Philippe FOLLIOT a souhaité savoir si la coopération internationale avec les gendarmeries européennes, espagnole, italienne, portugaise … était toujours à l’ordre du jour.
Vous trouverez ci-dessous le texte de son intervention :
Philippe Folliot. Mon général, un de nos collègues s’étonnait qu’il ait fallu attendre seize ans la construction d’une brigade de gendarmerie dans son département. Malheureusement, on peut faire mieux, puisqu’il y a dix-sept ans dans cette même commission, j’interrogeais déjà l’un de vos prédécesseurs sur la brigade de gendarmerie de Lacaune. On me dit régulièrement que ça avance. Peut-être nous donnerez-vous de bonnes nouvelles.
Je voudrais très sincèrement m’associer aux remerciements adressés aux forces de gendarmerie, en général, et aux forces mobiles, en particulier, extrêmement sollicitées pendant la crise des gilets jaunes, mais aussi lors d’engagements comme ceux que nous avons connus il y a quelques années dans mon département, à Sivens, avec un degré de violence qui n’avait plus été atteint depuis longtemps dans des démocraties, sauf peut-être en Irlande-du-Nord, et avec parfois l’utilisation d’armes létales.
Je veux vous interroger sur les véhicules blindés à roue de la gendarmerie (VBRG). Conçus à la fin des années 1960, les premiers ont été mis en service en 1974 et aujourd’hui, seuls 30 % des 180 d’origine restent opérationnels. On avait envisagé de reprofiler des véhicules de l’avant blindés (VAB) pour les affecter à la gendarmerie. Qu’en est-il au regard de l’évolution de la situation sociale et des besoins de maintien de l’ordre, non seulement dans l’Hexagone mais aussi dans les départements et collectivités d’outre-mer ?
Qu’en est-il, enfin, de la coopération internationale avec les gendarmeries européennes, espagnole, italienne, portugaise ou roumaine et autres, mais aussi d’Afrique francophone ?
Richard LIZUREY, Directeur général de la gendarmerie. Monsieur Folliot, vous évoquiez la brigade territoriale de Lacaune. Je n’ai pas d’information, mais nous allons nous renseigner.
Vous avez évoqué la hausse du niveau de violence à l’encontre des gendarmes et la question des VBRG et des VAB MO. Nous avons 84 engins blindés opérationnels, la moitié en outre-mer et la moitié en métropole. Depuis décembre 2018, nous avons vu que cela pouvait présenter un intérêt dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre. Dans le cadre de l’élaboration du livre blanc, nous cherchons à déterminer si et dans quelles conditions il est possible de renouveler la flotte actuelle des véhicules blindés.
Le VBRG est né avec la 4L, et j’en profiterai pour saluer les mécaniciens de Satory qui refaçonnent des pièces pour permettre aux VBRG de continuer à fonctionner. On a longtemps envisagé le développement d’un programme de véhicules blindés de nouvelle génération, mais c’est devenu hors de portée budgétaire et peu souhaitable, car on ne va pas engager un programme pour 84 véhicules blindés. Nous nous orientons vers le rétrofit des véhicules blindés actuels et des VAB qui ne sont plus d’utilité aux armées. Dans le cadre du renouvellement de ses matériels l’armée de terre, n’a plus l’utilité de certains VAB et j’ai demandé qu’on nous les cède afin de les « gendarmiser » en les remotirisant et en les peignant en bleu pour les mettre à la disposition des unités de gendarmerie, notamment outre-mer. Les VAB présentent l’avantage d’être surblindés. J’ai besoin de la moitié des 84 véhicules blindés outre-mer, plutôt des VAB MO, le reste étant des VBRG rétrofités. Le prix des prototypes négocié avec l’industriel est de 250 000 euros pièce, incluant la remotorisation complète, la climatisation et la révision de l’ensemble du système, soit cinq à six fois moins cher que le développement d’un matériel par des industriels. Nous sommes plutôt sur ce modèle, avec six ou sept matériels rétrofités chaque année pendant quatre ou cinq ans. Nous disposerions ainsi au bout de cette période d’une flotte de 84 véhicules blindés qui pourraient repartir pour trente, quarante ou cinquante ans.
La coopération internationale se fait avec les gendarmeries « sœurs », soit au sein de la FIEP, organisation un peu informelle qui a commencé à fonctionner avec la France, l’Italie, l’Espagne et le Portugal, qui s’est d’ailleurs réunie hier et avant-hier et à laquelle j’ai envoyé le général adjoint au major général. Regroupant maintenant aussi la Jordanie, le Maroc et le Chili, elle permet de partager les bonnes pratiques et les expériences. C’est un travail international intéressant parce qu’on se retrouve après dans les opérations extérieures. Il y a aussi la force de gendarmerie européenne (FGE), beaucoup plus normée, dont l’état-major est à Vicenza, en Italie, et qui a une capacité d’intervention sous mandat de l’Union européenne. Nous sommes intervenus en Afghanistan et nous envisageons d’intervenir dans la bande sahélo-saharienne dans le cadre des nouvelles propositions qu’on nous a demandé de faire. C’est un outil intéressant qui permet d’afficher une intervention européenne répondant à un processus décisionnel qui remonte au niveau de Bruxelles.
Plus largement, j’ai environ 500 militaires de la gendarmerie à l’étranger sous toutes les bannières : l’Union européenne, l’ONU – le responsable de la mission EUCAP Sahel Mali est un gendarme, le général Rio, patron de l’ensemble de la composante ONU de la police civile -, l’OSCE, pour accompagner les armées sous mandat national, soit sous la prévôté, soit en bilatéral. Nous avons aussi le projet groupe d’action rapide, de surveillance et d’intervention (GARSI), programme européen doté de 41 millions d’euros, qui vise les cinq pays du Sahel plus le Sénégal. Nous sommes leader au Burkina Faso et au Sénégal pour mettre en place des unités d’une centaine de personnels chargés de la lutte contre la criminalité, des contrôles aux frontières et de la lutte contre les trafics. Chaque pays du Sahel plus le Sénégal a créé au moins une unité de ce type et est en train d’en créer une deuxième, voire une troisième. C’est une manière de multiplier les capacités d’intervention dans cette zone très compliquée, toujours en liaison avec nos camarades des armées. Nous sommes systématiquement en lien avec les unités déployées, car il est important de partager l’information et le renseignement dans ce domaine.