Le changement climatique est une évidence de plus en plus prégnante et la sécheresse que nous connaissons ainsi que les épisodes de canicules de plus en plus fréquents en sont une illustration. Le Président Chirac avait dit de manière très imagée lors d’un sommet à Johannesburg en 2002 : “Notre maison (la Terre) brûle et nous regardons ailleurs…”
Aujourd’hui nous ne pouvons plus regarder ailleurs car la terre brûle au sens propre du terme comme les récents incendies ravageurs en Gironde l’attestent si durement. Vous me direz que ce n’est pas un phénomène nouveau, et que des incendies de forêt il y en a toujours eu et le plus grand incendie de France reste celui des Landes en… 1949 !
Pour autant, ce qui change c’est que les feux de forêt sont de plus en plus nombreux et violents ne serait-ce que par une des conséquences du changement climatique car au-delà de la hausse prévisible des moyennes des températures, c’est la “méditerranisation” du climat avec des niveaux de précipitations comparables mais de plus en plus violents et de plus en plus espacés (avec de terribles inondations) et avec donc, très vraisemblablement, de toujours plus longues périodes de sécheresse entre ces épisodes parfois extrêmes.
Bien entendu, sous le coup de l’émotion, on salue unanimement et c’est bien normal, la sécurité civile, nos pompiers, véritables “soldats du feu” en première ligne pour éteindre les incendies. On s’insurge du manque de moyen à relativiser au regard du coût des S.D.I.S (Services Départementaux d’Incendie et de Secours) dont l’addition a explosé ces dernières décennies (En 2020, les dépenses des SDIS se sont élevées à 5,2 Mds€, alors qu’ils étaient de 4,5 Mds d’euros en 2009). Même l’armée va être mise en contribution avec une utilisation des A-400M adaptés et transformés pour larguer non pas des parachutistes mais… de l’eau !
Sans un effort de prévention, je l’affirme avec force, cette bataille sera perdue d’avance et nous devons réellement nous poser des questions sur la gestion des forêts. Comme l’illustre cet article de journal, concernant la calamiteuse gestion de la forêt de la Teste-de-Buch, une certaine vision écologiste et archaïque qui vise à sanctuariser la forêt et l’arbre qui deviendrait un totem auquel il ne faudrait pas toucher, est caricaturale et nous devons sortir de cette vision pour plusieurs raisons.
Tout d’abord la forêt, comme l’arbre qui la compose, elle vit : elle nait, elle croît et capte du CO2, elle s’adapte, et à la fin elle peut mourir ! Ne pas l’entretenir, ne pas faire des coupes, sélectives de préférence et rases quand cela est nécessaire, c’est important pour la forêt elle-même mais aussi pour nous et notre environnement. La filière bois dans notre pays représente près de 440 000 emplois, elle s’est beaucoup modernisée et structurée ces dernières années et a fait beaucoup d’efforts pour améliorer ses performances écologiques et environnementales. Pour que la filière fonctionne, encore faut-il pouvoir exploiter les forêts.
Dernièrement au Sénat, j’assistai à une réunion avec les professionnels de la filière. Ils nous faisaient part de leur colère face aux agissements de certains voyous sous couvert d’intégrisme écologique et qui régulièrement détruisent des engins de coupes et débardage, laissant entreprises et salariés en plein désarroi quand ceux-ci ne sont pas de surcroit victimes d’intimidations, voire de menaces professionnelles et personnelles.
Un forestier n’est pas un criminel mais un travailleur pour la nature, le bien public et l’intérêt général qui fait le plus souvent son boulot consciencieusement.
Qui peut croire qu’écologiquement c’est mieux de remplacer les granulés de bois par le charbon, les poutres de nos charpentes par du métallique, notre mobilier par du plastique…
Le bois est une matière première vivante, réutilisable et renouvelable !
L’autre question cruciale qui en parallèle se pose et celle de l’eau !
Dans notre sud Ouest, l’agence de bassin Adour Garonne estime à cent milliards de m3 les volumes d’eau manquant. On a par exemple renoncé (provisoirement je l’espère) à faire des retenues dans la vallée du Tescou (Sivens représentait 1,5 millions de m3) et celle-ci souffre cruellement du manque d’eau comme bien d’autres du reste. De tendue, la situation dans nombre de départements passe à critique pour bientôt devenir catastrophique.
Si l’acceptation sociale des grands barrages notamment par certains bobos (ils ne veulent pas de retenues près de chez eux mais crient quand ils n’ont pas assez d’eau pour remplir leur piscine privé) est de plus en plus difficile, qu’on laisse au moins les agriculteurs faire des petites retenues collinaires. C’est tout le sens d’un amendement que j’avais déposé lors de la loi Climat et Résilience et du projet de loi 3DS.
Les retenues collinaires sont des ouvrages de stockage remplis par les eaux de surface et les eaux de ruissellement, et qui fonctionnent comme de petits barrages. Ces eaux sont utilisées ensuite dans les domaines de l’irrigation agricole principalement.
Ces retenues sont à ce jour complexes à mettre en place, car une étude d’impact et diverses démarches administratives sont nécessaires pour confirmer leur autorisation. Elles répondent pourtant à un besoin de stocker l’eau parfois urgent pour les agriculteurs, qui souffrent de la difficulté à construire des retenues de petite taille. L’amendement que j’avais défendu visait ainsi à substituer à un régime complexe une simple déclaration et un délai de deux mois dans le cas des projets de petites retenues collinaires (moins de 20 000 m3 soit quatre piscines olympiques)
Si nous ne sommes collectivement pas capables de trouver les moyens pour stocker de l’eau quand elle tombe pour la restituer un peu plus tard, on va droit dans le mur !
Eau et feu disais-je en introduisant cette réflexion, je n’irai pas jusqu’à dire qu’il y a “le feu au lac”, quoique, du “biais” dans ces affaires serait du plus grand secours pour préserver nos forêts du feu, et pour préserver nos ressources en eau !
Amitiés,
Philippe Folliot