Démocraties en danger?

Les démocraties sont elles en danger?… Comme disait Churchill « la démocratie est un mauvais système mais le moins mauvais des systèmes » Toutefois les coups contre les démocraties pleuvent, ils sont exogènes tout d’abord.

En effet, les attaques viennent effectivement de l’extérieur par des régimes qui, d’autoritaires sont devenus dictatoriaux, à l’exemple de la Russie qui a sauvagement agressé l’Ukraine. Il y a aussi des organisations terroristes qui ciblent plus particulièrement les démocraties, nous avons connu cela notamment en France en 2015 et nous venons de le revivre avec les effroyables attaques du Hamas contre Israël. Rien, rien ne saurait justifier des attaques ciblées et aveugles contre des populations civiles. La politique israélienne vis à vis des palestiniens est contestable et les extrémistes de tous bords , d’un côté comme de l’autre, profitent de cette situation. Même si la présence au parlement israélien d’une extrême droite raciste est dangereuse et l’affaiblit, ce pays demeure une démocratie vivante, avec des élections libres et des alternances régulières.

J’ai eu l’occasion par le passé d’écrire dans un éditorial que la non résolution du conflit israélo-palestinien était une épée de Damoclès sur les équilibres géopolitiques dans cette région. Nous en avons la preuve et voyons très bien l’instrumentalisation de ces attaques terroristes par l’Iran qui, ne nous y trompons pas, veut aussi et surtout empêcher toutes perspectives de rapprochement voire de paix entre l’Arabie Saoudite et Israël, à l’instar de ce qui a été fait il y a longtemps avec l’Egypte et plus récemment avec le Maroc ou les Emirats Arabe Unis.

Que ce soit en Amérique latine, en Afrique en général et au Sahel en particulier, en Asie du sud-est, à Taiwan… les temps sont compliqués pour les régimes démocratiques et les défenseurs de la liberté.

Lundi, à Copenhague, nous avons décerné, au sein de l’AP OTAN, le prix « femmes pour la paix et la sécurité » à Sveltana TSIKHANOUSKAYA, leader des forces démocratiques Bélarusses et cheffe de file du cabinet de transition unie au Bélarus . Son témoignage sur son combat et celui de ses amis pour la démocratie était bouleversant.

Je l’ai effleuré tout à l’heure, il y a aussi des dangers endogènes pour les démocraties et nous avons tous en souvenir les incidents du Capitole à Washington en janvier 2021 ou ceux du Brésil en janvier 2023 avec chaque fois des responsables de droite extrême qui refusent de laisser se dérouler une transition démocratique. Il y a aussi les présidents de gauche extrême qui, après avoir perdu les élections, confisquent le pouvoir comme au Nicaragua ou au Venezuela…

Il y a un autre risque moins frontal et plus pernicieux pour les démocraties c’est la tentation de prise en otage de décisions prises démocratiquement par une petite minorité organisée et déterminée qui par tous les moyens veulent bloquer les processus décisionnaires. 

Il va de soi qu’en démocratie chacun a le droit légitime d’exprimer son opposition à une idée, un projet ou une réalisation, mais pour autant celle-ci s’arrête au moment ou on ne respecte plus le cadre démocratique.

Prenons l’exemple de l’A69 Castres Toulouse. Ce projet a fait l’objet de deux débats publics ( grand contournement de Toulouse en 2007 l’autoroute Castres Toulouse en 2010) qui ont coûté des centaines de milliers d’euros, moultes contributions ont été déposées ou chacun a pu exprimer ses opinions et positions. De tout cela est ressorti une écrasante majorité en faveur du projet puis une décision gouvernementale, un vote parlementaire qui ont abouti à une Déclaration d’Utilité Publique.

 Le projet a été financé avec une participation des collectivités locales et de l’Etat (du reste 90% inférieure aux prévisions) et un concessionnaire innovant a été choisi qui prévoit moins d’artificialisation et plus de compensations environnementales.  Cette DUP, et c’est le droit des opposants en démocratie,  a été contestée devant les tribunaux et tous les recours ont été perdus par ceux-ci. Maintenant on en arrive à la situation actuelle ou certains opposants radicaux et extrémistes veulent faire arrêter un chantier engagé et ce, uniquement, au nom de leurs propres visions des choses.

Tout ceci est insupportable et nous, ruraux et habitants des villes moyennes du sud du Tarn ou d’ailleurs, nous en avons 

ASSEZ!

ASSEZ d’être victimes d’une injustice territoriale pénalisante pour tout un bassin d’emploi, ses habitants, ses forces vives économiques et syndicales.

ASSEZ d’être pris en otage par des acteurs politisés extérieurs qui instrumentalisent une cause dite environnementale contre l’aménagement d’un territoire. 

ASSEZ des donneurs de leçons extérieurs qui n’ont jamais mis les pieds dans le Tarn et veulent nous dicter ce qui serait bon ou pas pour nous. Samedi dernier, encore, sur une grande radio nationale je me suis retrouvé face à trois opposants à l’A69 : un géographe parisien, un auditeur de Boulogne Billancourt et un gréviste de la faim néo rural vivant dans les hautes Pyrénées !!!!  

ASSEZ d’être traités d’ irresponsables écocides alors que nous sommes sur un territoire qui a peu artificialisé jusque là, qui a toujours fait des efforts et les poursuit notamment sur les transports collectifs et doux, la sobriété énergétique et le développement des énergies renouvelables…

ASSEZ que la voix des élus, qui ont reçu la légitimité du suffrage universel, soit par certains, perçue égale ou inférieure à celles d’associations, collectifs, ONG, dont parfois les membres ne représentent qu’eux-mêmes.

ASSEZ alors que l’Etat, suite aux annonces en 2021 sur place du premier ministre, devrait afficher une position ferme et sans faille, , nous ne sommes pas naïfs pour ne pas voir dans les « tergiversations » du ministre des transports, que celui-ci souhaiterait, sur notre dos, donner quelques gages à un électorat écolo-bobo de la capitale au regard de ses probables visées sur la mairie de Paris .

ASSEZ! L’agglomération Castres Mazamet est le seul territoire de plus de 100 000 habitants à ne disposer ni d’autoroute, ni de gare TGV, ni d’aéroport international!

ASSEZ, nous en avons ASSEZ parce que nous voyons que si ce projet était arrêté, la parole de l’Etat serait durablement discréditée et tous projets dans ce département (qui a déjà connu le regrettable abandon du projet de Sivens) comme ailleurs dans le pays, seraient dorénavant susceptibles, même une fois engagés, d’être arrêtés par une minorité organisée contre la majorité démocratique.

Enfin ASSEZ d’être pris pour des « bouseux », des « attardés » , des « imbéciles »… Je sens comme jamais une colère sourde qui remonte de nos territoires et je crois qu’il serait dommage pour ne pas dire irresponsable de ne pas l’entendre.

Amitiés,

Philippe Folliot

Démocraties en danger?