La défense de l’environnement est quelque chose d’essentiel et de fondamental tant nous mesurons chaque jour notre devoir de responsabilité vis-à-vis des générations futures.
J’ai déjà écrit à plusieurs reprises sur les cinq dettes que nous léguons à nos enfants et petits-enfants : dette publique, dette sociale, dette générationnelle, dette Covid et dette environnementale.
J’entends bien la volonté du Président de la République de vouloir répondre aux aspirations d’une partie de l’opinion publique, et notamment de nombre de nos jeunes concitoyens sur ces questions. Il a voulu l’incarner avec la Convention Citoyenne sur le Climat, initiative louable et sympathique, mais qui par sa tournure devient un dangereux précédent.
Pour ma part, en tant que parlementaire ou élu local, j’ai toujours défendu une action volontariste et non dogmatique en la matière.
Certains se sont interrogés sur le fait du pourquoi les commissions environnement de l’Assemblée nationale et du Sénat, seraient-elles moins légitimes et compétentes, que des citoyens « tirés au sort », pour aborder ces questions et faire des propositions ?
Ce qui a choqué, c’est l’exigence de certains membres de cette convention que toutes leurs propositions soient reprises et ce qui a surpris, c’est que le Président de la République tombe dans ce piège, en s’engageant à reprendre à la quasi-totalité des points débattus par une assemblée respectable, certes, mais pas élue démocratiquement.
Je ne vais pas revenir sur l’ensemble de ces propositions dont, du reste, un certain nombre sont de bons sens et font consensus.
Je voudrais m’attarder avec vous sur la proposition clé de modification de l’article premier de notre Constitution qui s’est traduit par un projet de loi constitutionnelle adopté par l’Assemblée nationale le 16 mars dernier. Celui-ci est très court et son intitulé stipule : « Après la troisième phrase du premier alinéa de l’article 1er de la Constitution, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Elle garantit la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et lutte contre le dérèglement climatique. » ».
Dans la hiérarchie des normes de notre Constitution, avec le mot « garantit », nous prenons le risque que la préservation de l’environnement prenne le pas sur les autres normes comme le caractère un et indivisible de notre République, son caractère laïque, démocratique et social.
Je suis consterné et effaré par une telle perspective. Le 28 février 2005, je n’avais pas voté le principe de précaution craignant (avec du recul à juste titre) que le caractère là-aussi louable et sympathique de la mesure proposée risquerait d’avoir de terribles conséquence. Nous avons vite vu les tristes effets (renvoyer à pérégrinations précautions).
Avec cette modification de la Constitution, c’est la même chose puissance dix. Nous prenons le risque d’aller vers une judiciarisation extrême de notre société et une multiplication exponentielle des contentieux.
Au nom de la garantie de préservation de l’environnement, tout citoyen pourra attaquer toutes décision d’un maire, d’une collectivité, de l’État sur tout projet d’intérêt collectif (une route, une école, un hôpital,…) pour le fait que, selon lui, il ne respecte pas cette garantie.
L’opportunité des projets ne sera in fine plus décidée par les élus mais par les juges. Pire encore, par le mécanisme de la QPC (Question prioritaire de constitutionnalité), c’est tout notre socle de lois, et avancées démocratiques et sociales qui pourrait être complètement déstabilisé avec toutes les funestes conséquences que cela va engendrer.
Je suis consterné que l’Assemblée nationale a, à une large majorité, adopté ce texte, cette folie juridique, au seul motif que c’était « un engagement du Président de la République » pour les uns ou politiquement correct, ou tendance, pour les autres
Montesquieu disait qu’il faut voter des lois « la main tremblante ». Pour la loi fondamentale, ce devrait être la main très très tremblante. Pour ma part, ma main n’a pas tremblé et c’est sans états d’âmes, même s’il a été modifié et assoupli par le Sénat, que j’ai voté contre ce dangereux projet de loi constitutionnelle.
Amitiés,
Philippe Folliot