Edito de La lettre d’information n°128 du mercredi 5 juin 2013
Ce sont des moments magiques et inoubliables que le Castres Olympique vient de faire vivre à toute une ville, un département, une région et… aux amoureux du rugby plus terroir que paillettes. Tout a déjà été dit sur l’aspect sportif des choses, d’une équipe qui a réussi le triple exploit durant ces phases finales de battre successivement, et avec la manière, les grosses écuries du meilleur championnat au monde qu’est le Top 14. Montpellier, « l’ambitieuse », puis Clermont, « la stratosphérique » vice-championne d’Europe en titre, et en finale, Toulon, « la galactique » championne d’Europe. N’en déplaise à quelques « spécialistes » souvent hautains et condescendants, cela a été fait par un petit club au petit budget (le 10ème du Top 14) dans une petite ville de 43 000 habitants, au petit stade désuet mais….avec de grands joueurs ! Derrière cette exceptionnelle réussite, il y a la démonstration que la « PSG Qatarisation » du rugby n’est pas inévitable. En effet, le modèle en vogue des grosses équipes avec constellation d’internationaux dans de gros clubs avec de gros moyens financiers, s’appuyant sur de grosses agglomérations avec des gros stades… n’est dorénavant pas le seul modèle possible et gagnant, comme le C.O l’a démontré, tout comme Oyonnax champion de Pro D2.
Merci à Monsieur Pierre Fabre et à son fidèle et dévoué Pierre-Yves Revol, à l’encadrement du club et son Président Michel Dhomps, aux deux exceptionnels entraîneurs « les Lolos », et à ces formidables joueurs aux parcours parfois surprenants et incertains, qui ont su puiser dans un collectif hors normes, avec cette foi exceptionnelle qui renverse les montagnes. Derrière cette réussite, il y a beaucoup de professionnalisme, de ténacité et de travail. Comme quoi, le probable n’est jamais sûr et donc l’impossible jamais loin.
Au-delà de cela, ce qui m’a le plus marqué et ému, c’est cette liesse populaire authentique et chaleureuse. Des tribunes du stade de France aux travées de « Pierre Antoine », ce peuple bleu et blanc qui s’est levé avec enthousiasme, dans une ferveur et communion exemplaires, avec ces héros qui les ont fait tous vibrer, réchauffe le cœur. En temps de crises, de violences, d’individualisme, de repli sur soi, d’égoïsme, ce bol de respiration collective, de chaleur humaine, de fêtes populaires, de fraternité rassure.
Le succès sportif, l’histoire du petit poucet qui renverse le gros (et les pronostics) ouvrent une belle image au chapitre de la glorieuse incertitude du sport. Cela a marqué et a été un vecteur exceptionnel d’image pour Castres. Député, je suis bien placé pour savoir, à Paris et ailleurs, depuis des années, que neuf fois sur dix quand je me présente, on associe l’image de Castres à celle de son équipe de rugby avant tout. Hier, un ami journaliste et spécialiste en communication me disait qu’au bas mot, ce sont 5 millions d’euros en terme d’image que cette victoire a apporté à Castres, en notoriété positive si on valorisait les passages télés, les radios, articles, qui sont publiés dans la presse… Il est heureusement loin le temps où un élu me répondait en conseil municipal ; « que l’on parle de Castres dans les médias nationaux m’importe peu ». Dans la compétition des territoires où l’image compte, c’est si important de redorer son blason !
C’est dans ces moments heureux où tout va bien qu’il ne faut pas oublier d’où l’on vient. Il y a cinq ans, le C.O luttait pour éviter la relégation et les tribunes du stade étaient souvent peu garnies : nous étions parfois à peine une grosse poignée pour soutenir le club à l’extérieur. C’est dans ces moments d’adversité que se forgent les futures victoires, que naissent les grandes épopées, que se comptent les vrais soutiens.
Cela, même dans l’ivresse de la victoire et dans le bonheur du succès, il est essentiel de ne pas l’oublier ! Tous les succès inattendus, il faut aller les chercher au fond de soi, avec acharnement et humilité. Parole d’un élu qui sait de quoi il parle.
Amitiés
Philippe FOLLIOT