Ce mercredi 1er juin la Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat auditionnait M. Éric BERANGER, président-directeur général de l’entreprise MBDA (filiale d’Airbus, BAE Systems et Leonardo) qui oeuvre dans le domaine de l’industrie de l’armement et notamment dans la conception de missiles.
Le Sénateur Philippe Folliot, qui est membre de la Commission sénatoriale mais également membre de la Commission « Économie et Sécurité » (ESC) de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, a pu mettre en avant son expérience personnelle à l’AP-OTAN dans laquelle il a pu constater comment les entreprises nord-américaines essayaient d’utiliser le levier politique de l’Organisation pour favoriser les exportations d’armement étasuniens en Europe. Le Sénateur du Tarn a ainsi souligné que 60% de l’augmentation du budget de la Défense européenne a servi à des achats sur étagère auprès de pays extracommunautaires, en particulier les États-Unis.
Le Sénateur a donc interrogé l’action des industriels européens pour essayer de contrecarrer cet aspect des choses et faire de telle sorte que la souveraineté européenne en matière d’industrie et de défense puisse être préservée.
Le PDG de MBDA a répondu qu’il fallait tirer des leçons au niveau de « l’équipe France », c’est-à-dire du trinôme Direction générale de l’armement (DGA), Armées, et Base industrielle et technologique de Défense (BITD). Dans cette coopération les besoins sont définis par les Armées et par la DGA mais la BITD doit pouvoir indiquer ce qu’elle est en mesure de faire, dans des coûts et des délais précis. De plus enfin, la DGA demande sur un certain nombre de programmes d’être totalement affranchis des industries de défense étrangère et le rôle de la BITD française serait donc de remplir ces besoins essentiels.
Le Sénateur Folliot a souhaité poser une autre question concernant les stocks de composants et d’équipements venant de pays extérieurs à l’Union européenne, notamment des États-Unis et de la Chine (le premier pour des raisons commerciales et le second pour des raisons stratégiques) avec la question du risque de dépendance nous mettant collectivement dans une situation de vulnérabilité.
Le PDG de MBDA, Éric Béranger a affirmé que si rien ne provenait de la Chine, certains systèmes et certains matériels pouvaient être achetés auprès des États-Unis. L’intervenant a cependant souligné un cadre, explique-t-il, suffisamment réfléchit avec un certain nombre de domaines où nous nous assurons de se limiter ou de s’affranchir de ces dépendances. Cela fait évidemment écho au risque d’extraterritorialté du droit étatsunien et des problématiques supplémentaires sur nos industries et sur notre souveraineté en matière de défense. Ainsi, il semblerait que nous soyons complètement affranchis sur le matériel le plus sensible.
Reste donc à déterminer quel est ce degrés de « sensibilité » puisque, comme l’avait déjà souligné Philippe Folliot en 2013 dans l’éditorial nº126 du vendredi 22 mars :
[l’industrie de la défense compte parmi les plus gros exportateurs.] Elle est stratégique pour notre souveraineté, avec l’indispensable socle d’achats domestiques pour nos propres besoins, et capitale en matière de recherche et développement au caractère souvent dual militaire / civil.
Dans un monde toujours plus instable et incertain où beaucoup se réarment, l’Europe baisse dangereusement la garde, la France faisant jusqu’à maintenant figure d’exception. Enjeu de sécurité intérieure et de lutte contre le terrorisme, l’opération SERVAL au Mali comme HARMATTAN en Libye ou notre engagement en Afghanistan et partout dans le monde ont montré que la France a, pour un coût très raisonnable, un outil exceptionnel d’affirmation, d’efficacité, de rayonnement et de grandeur avec des militaires d’un professionnalisme exemplaire et des matériels de qualité.