Pérégrinations autour d’un mot : ÉCRITURE

| 10 AVR. 2020 |

Depuis le début du confinement, je m’astreins à cette discipline, à cette gymnastique intellectuelle, à cette ambition : écrire !

Confiné, « entre moi et le monde, une vitre. Ecrire est une façon de la traverser sans la briser ». Cette belle citation, de l’écrivain et poète Christian BOBIN me parait bien adaptée à la situation très particulière que nous vivons.

Depuis mon bureau-bibliothèque, avec vue sur la campagne environnante, je prends mon stylo pour coucher sur le papier ces quelques phrases. Ce lien physique, je dirais presque charnel, de la plume à la page blanche pour noircir ou bleuir le papier avec une succession de mots qui deviennent affirmations, interrogations, convictions, démonstrations… peut paraître pour certains un peu « ancien monde » !

Je subis le clavier et ne l’utilise que pour le quotidien, pour l’immédiat ; pour la réflexion, j’ai besoin de calligraphier les choses pour m’exprimer. Cela a toujours été le cas et il est difficile pour moi d’en changer. Que ce soit pour une pérégrination, un édito, un article, un discours ou un livre, il en a toujours été ainsi. Est-ce une fascination pour celles et ceux qui ont écrit ces belles pages de notre grande littérature, ou le poids conformiste de l’habitude, mais, au grand dam de mes proches collaborateurs qui décryptent puis tapent le fruit de la glissade de mots sur le papier immaculé, et que je remercie pour leur patience et dévouement, j’en reste là. Une vidéo à diffuser expressément sur les réseaux sociaux serait tellement plus tendance !

Derrière l’acte d’écriture, il y a pour moi tout d’abord la fondamentale liberté d’expression intrinsèquement liée à notre Etat de Droit, un bien commun que nous devons coûte que coûte préserver. Dans trop d’endroits dans le monde, sous un vernis démocratique, il y a une réalité toute autre, et c’est un des enjeux de la crise actuelle d’arriver à faire en sorte que nos valeurs intemporelles, pour lesquelles sans cesse nous nous battons, comme bien d’autres avant nous, continuent à être la référence, la « Lumière » de notre peuple de France et de ceux du monde.

Je n’irai pas jusqu’à dire qu’écrire est un acte de résistance, mais en tout état de cause, cela peut y ressembler ne serait-ce que pour prendre date et, face à la tyrannie de l’émotion, à la dictature de l’instantanéité – elle parait inéluctable – pour prendre du champ, de la profondeur voire, à certains moments, un peu de hauteur salutaire.

Je n’en suis pas au stade où l’écriture est un métier, voire une drogue avec « obligation » de produire, j’ai la grande chance que cela demeure un plaisir qui, je l’espère au moins pour quelques-uns qui du reste m’en témoignent, est… partagé !

Après avoir écrit (ou co-écrit) cinq livres, un sixième voire un septième sont en préparation, il s’avère que l’exercice est voisin mais pas similaire, car la tribune est plus directe et spontanée, quand le livre est plus profond et réfléchi, la distanciation au temps n’est pas tout à fait la même.

Finalement, je vois autour de moi de plus en plus de personnes qui s’essaient à l’écriture, comme il parait que depuis le confinement les gens se téléphonent plus souvent, regardent la télévision plus souvent, feuillettent la presse plus souvent et lisent des livres plus souvent !

L’ancien monde n’est pas tout à fait mort ; que le nouveau à venir puisse y puiser quelques fondamentaux dont… l’écriture !

Amitiés,              
Philippe FOLLIOT

Pérégrinations autour d’un mot : ÉCRITURE