| 3 JUIN 2020 |
« Rugby école de la vie, Rugby école de la vie… ». Que d’émotions ressenties quand des centaines de gamins scandaient ce refrain il y a quelques années quand, avec mon ami Germinal PEIRO, co-président du XV parlementaire, nous nous sommes rendus à Madagascar, à Nosy Bé, pour apporter le financement pour la construction d’un terrain de rugby. Ces moments resteront à jamais gravés dans nos mémoires tant était touchant l’enthousiasme de ces enfants qui, jusqu’alors, maniaient le ballon ovale sur un simple terrain vague.
Il y a un mystère, une alchimie, une énigme autour de ce sport. Une origine romanesque quand, en 1823, le jeune William Web Ellis se saisit du ballon à pleine main pour le poser entre les poteaux ; de ce fait naît une épopée qui vit un collège, ou plutôt la ville de ce collège, Rugby, donner son nom à un des sports les plus populaires qui soit.
Quel paradoxe quand on oblige les équipes à faire des passes en arrière pour mieux… avancer ! Sport de contact par essence, au strict opposé de la distanciation aujourd’hui de mise, rugueux, physique, engagé, un temps presque violent, mais aussi d’évitement, de cadrages-débordements, d’envolées, d’échappées, « ce sport de voyous pratiqué par des gentlemen » a suscité non pas une histoire mais une forme de fascination collective, une introspection partagée. Des années voire des décennies après, on refait le match, tel derby musclé, telle finale disputée, tel crunch engagé, où après quelques apéritifs anisés, mousses, verres de vin ou d’armagnac appréciés, les grandes batailles napoléoniennes sont… éclipsées ! Le Rugby n’est pas la guerre, la guerre civile, mais… qui n’a pas ressenti l’adrénaline du vestiaire, cette boule au ventre avant de rentrer sur le pré, avant de tout donner sur le terrain, « à la vie à la mort » pour gagner ne peut vraiment connaitre le Rugby !
Historiquement, ce sport fut bigarré, des gros en première ligne, des grands en deuxième ligne, des costauds en troisième ligne, un petit à la mêlée, un futé au bon pied à l’ouverture, des solides au centre, des rapides à l’aile et un avisé à l’arrière, une équipe de Rugby c’était la diversité dans la vie !
Le professionnalisme au niveau de l’élite a lissé les gabarits sur des jauges surdimensionnées, mais même si l’argent ici comme ailleurs est roi, pour autant la magie a continué à fonctionner. Rien n’est écrit au rugby, l’épaisseur du budget n’est pas toujours en corrélation avec l’épaisseur des palmarès. « Les petits » gagnent ici, point d’ogre qatari, de par la féérie des phases finales, de ces exodes printaniers, c’est tout le peuple d’une ville, d’une contrée, qui voyage, qui pousse, qui crie, qui s’époumone, qui souffle, qui souffre, pour espérer, douter, vibrer, partager et gagner !
Oui, je l’affirme avec force et conviction, « Béloni n’est pas mort », oui mes amis, l’émouvant Béloni de Jean COLOMBIER est éternel ! Je l’ai rencontré dans nos villages et quartiers, passionné, envoûté, engagé, enflammé. Il est toujours là, bénévole, éducateur, soigneur, entraîneur, tous les dimanches après-midi il vibre, il virevolte, il vit, car il est l’âme de l’ovalie.
Mon intuition est sereine, ma conviction est profonde, ma certitude est pleine, « au diable distanciation » : le Covid-19 est moins fort que le Rugby.
On se prépare puis on jouera deux mi-temps, on trinquera pour une troisième, pour retrouver dès septembre, tous ensemble, le chemin des stades car, comme le scandaient les gamins, le rugby est plus fort, « Rugby école de la vie, Rugby école de la vie… ».
Amitiés,
Philippe FOLLIOT