En deuxième lecture du projet de loi sur la consommation débattu au mois décembre dernier, Philippe FOLLIOT s’est prononcé dans l’hémicycle sur l’article 62, relatif au gaspillage alimentaire. Il s’est étonné, au nom du groupe UDI, qu’un de ses amendements avait été considéré comme irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution alors qu’il était pourtant gagé au niveau de l’Etat et des collectivités territoriales. L’objectif proposé, dans cet amendement, était d’institutionnaliser au niveau local la gestion des surplus alimentaires par les collectivités territoriales. Le gaspillage alimentaire est devenu ces dernières années un vrai problème auquel il faut faire face. Des initiatives prises par diverses organisations, gouvernementales, et non gouvernementales, tentent de lutter afin d’y remédier. Mais le plus scandaleux, c’est le gaspillage des surplus alimentaires, de denrées encore parfaitement consommables. Le but de cet amendement est de rendre compétentes les collectivités territoriales pour organiser des réseaux de gestion locale de ces surplus alimentaires, de les institutionnaliser, en particulier pour les denrées périssables et non périssables non commercialisées, bien sûr dans le respect des normes d’hygiène, introduisant ainsi du bon sens dans le fonctionnement des circuits alimentaires, tout en mettant en œuvre une solidarité nationale. Cet amendement à l’initiative de l’UDI, au-delà de sensibiliser, souhaitait qu’il y ait une vraie prise de conscience. Philippe FOLLIOT, à la fin de son intervention, a rendu hommage aux bénévoles qui travaillent à la « ramasse » et souvent de manière très artisanale, afin d’éviter le gaspillage et de donner accès à des denrées à ceux qui n’en ont pas les moyens.
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Monsieur Philippe FOLLIOT. C’est en fait un rappel au règlement que j’aurais du faire, monsieur le président, sur la base de l’article 58, alinéa 1, relatif au déroulement de nos travaux, car je veux m’étonner, au nom du groupe UDI, de la décision de la commission des finances, qui a considéré un de mes amendement irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, alors qu’il était doublement gagé, au niveau de l’État comme des collectivités territoriales. Cet amendement prévoyait d’institutionnaliser au niveau local la gestion des surplus alimentaires par les collectivités territoriales. Je suis d’autant plus étonné de la déclaration d’irrecevabilité que cet amendement reprend une proposition de loi que j’ai déposée il y a peu et qui, elle, a été considérée comme recevable par notre assemblée. C’est dommage ! Cet amendement visait à rendre les collectivités territoriales – notamment les communes, les intercommunalités et les départements au titre de leurs compétences d’action sociale – compétentes pour organiser des réseaux de gestion locale des surplus alimentaires, concernant notamment les denrées périssables et non périssables non commercialisées par les grandes et moyennes surfaces, dans le respect des normes d’hygiène. L’alimentation est, on le sait, un enjeu fondamental pour notre société. Elle fait l’objet d’une politique publique complexe, qui doit trouver un équilibre entre production massive, développement durable et santé publique. Ces dernières années, plusieurs organisations gouvernementales, non gouvernementales et associatives ont promu des initiatives afin de remédier au gaspillage alimentaire en France. Si la lutte contre le gaspillage des ménages constitue un chantier à part entière, la lutte contre le gaspillage des surplus alimentaires des grandes et moyennes surfaces est un vrai sujet. Ne faudrait-il pas que celles-ci soient obligées de donner leurs surplus au lieu de les jeter ? Nous avons tous à l’esprit les images de ces containers de grandes surfaces où l’on entasse des denrées parfaitement consommables, on éventre les emballages et on les asperge de Javel afin qu’elles ne puissent être utilisées. C’est totalement scandaleux. Les banques alimentaires récoltent et distribuent chaque année aux Français plusieurs milliers de tonnes de denrées alimentaires. Pourtant, cette collecte reste marginale au regard des centaines de milliers de tonnes jetées et détruites par les moyennes et grandes surfaces chaque année. Car si certaines jouent bien le jeu, d’autres ne le jouent pas du tout. Notre amendement visait à une prise de conscience. Preuve que ces initiatives portent leurs fruits : le réseau des banques alimentaires a annoncé avoir doublé le stock de ses collectes en dix ans. À l’heure actuelle, deux programmes assurent la lutte contre le gaspillage des surplus alimentaires des grandes et moyennes surfaces en France : l’Union européenne met en œuvre le programme européen d’aide aux plus démunis – souvent remis en cause –, tandis que la France organise le plan national d’aide alimentaire. Ces deux réseaux ont permis de récolter près de 96 000 tonnes de denrées en 2010, ce qui correspond à 185 millions de repas distribués en France cette même année. Si la collecte auprès des grandes et moyennes surfaces tend à se développer, elle n’est pas encore institutionnalisée. Notre amendement aurait permis aux collectivités locales, notamment aux communes et aux intercommunalités, de mettre en œuvre localement des dispositifs organisés de collecte de denrées alimentaires dans le cadre de circuits courts, et dans le strict respect des règles d’hygiène alimentaire. En institutionnalisant au niveau local la gestion des surplus alimentaires par les collectivités territoriales, nous aurions introduit un peu de bon sens dans le fonctionnement des circuits alimentaires : il se serait agi d’un acte de solidarité nationale ! Je me tourne vers vous, monsieur le ministre. Le Gouvernement envisage-t-il de reprendre à son compte ce sujet essentiel, dans la mesure où nous discutons d’un texte relatif à la consommation ? Notre proposition constituerait un outil important sur le plan social, puisqu’elle soutiendrait les associations qui œuvrent dans ce domaine, mais aussi sur un plan strictement moral. Dans une période de crise particulièrement difficile, il est insupportable que certaines populations aient du mal à se nourrir dans de bonnes conditions alors qu’à côté, on jette et on gaspille de manière tout à fait scandaleuse et éhontée. Au travers de cet amendement, nous proposions d’institutionnaliser ces actions de collecte alimentaire à l’échelle des collectivités locales. Face à cette application de l’article 40, c’est un sentiment de révolte qui nous envahit. Je regrette que la commission des finances ne soit pas représentée dans cet hémicycle – c’est dommage, car son président est passé tout à l’heure. Notre règlement est parfois appliqué de façon trop abrupte. Je ne vois pas pourquoi une mesure contenue dans une proposition de loi serait déclarée recevable, alors que la même mesure reprise mot pour mot dans un amendement est déclarée irrecevable, a fortiori dans le cadre de la discussion d’un texte relatif à la consommation. C’est un cri du cœur. Cette situation est un véritable scandale. Il est dommage que nous n’ayons pas pu nous servir du présent projet de loi pour répondre à un besoin exprimé par nombre de nos concitoyens, mais aussi par de nombreuses associations caritatives. Je veux rendre un hommage appuyé à tous ces bénévoles qui se battent, à travers ce qu’ils appellent « la ramasse » et qu’ils assurent de la manière la plus artisanale qui soit, avec les moyens qui sont les leurs, afin qu’il y ait moins de gaspillage et surtout que certains de nos concitoyens aient accès à des denrées qui, sinon, seraient purement et simplement détruites.