Philippe Folliot a posé hier à l’Assemblée une question orale sans débat sur la gestion du parc Cap’Découverte. Depuis le début de ses mandats d’élu, le député a toujours porté une attention particulière à ce parc d’attraction dont il a souvent dénoncé la gestion calamiteuse. La session de questions orales sans débats a donc été l’occasion d’attirer l’attention du gouvernement sur ce que Philippe Folliot qualifie de « gabegie », et ce notamment au regard de l’importance des fonds publics qui y ont été investis.
Voici la retranscription de l’intervention de M. Folliot ainsi que la réponse du Secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, Monsieur Pierre Lellouche :
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour exposer sa question, n° 1696, relative à la gestion du parc Cap’Découverte dans le Tarn.
M. Philippe Folliot. En 1981, François Mitterrand, alors candidat à l’élection présidentielle, proposa de relancer l’exploitation de charbon à Carmaux, dans le Tarn, notamment sur le site qu’on a nommé la Grande Découverte. En 1997, il a été mis fin à cette exploitation, en raison de résultats financiers désastreux. Près de 800 millions d’euros d’argent public ont en effet été investis quasiment en pure perte, puisque le produit de l’exploitation s’est élevé à seulement 12 millions d’euros.
Le 25 juin 2003 fut inauguré Cap’Découverte, un projet touristique implanté sur le site de la Grande Découverte, avec l’aide de l’État et des collectivités départementale et régionale. Ce parc de loisirs, qui ambitionnait de devenir le centre européen de la glisse, n’a pas atteint les objectifs qui lui avaient été assignés en termes de fréquentation. Au reste, la qualité des infrastructures s’est révélée à bien des égards plus que médiocre. Ainsi, en novembre 2009, une défaillance du système de maintenance du matériel a conduit à l’inondation des installations, provoquant des dégâts considérables.
Dans l’incapacité de gérer ce parc dans de bonnes conditions, les collectivités ont fait appel à un partenaire privé, Vert Marine, qui bénéficie de subsides publics à hauteur de 4 millions par an, alloués, pour moitié, par la région et, pour l’autre moitié, par le département. Toutefois, le parc attire à peine quelques dizaines de milliers de visiteurs par an, en dépit de pratiques commerciales qui peuvent s’apparenter à une concurrence déloyale vis-à-vis des autres parcs de loisirs du département.
Il s’agit donc d’une véritable gabegie, puisque, je le répète, ce site bénéficie d’aides annuelles qui s’élèvent à plusieurs millions d’euros. Au total, depuis l’exploitation du site minier jusqu’à celle du parc de loisirs, près de 900 millions d’euros d’argent public ont ainsi été dépensés en faveur de ce site, pour un résultat quasiment nul.
Je souhaiterais donc que le Gouvernement éclaire l’Assemblée nationale sur le montant des fonds publics alloués par l’État au parc de loisirs Cap’Découverte et à sa société gestionnaire Vert Marine, ainsi que sur le montant des aides versées par les collectivités locales. Dans l’état actuel de nos finances publiques, la gestion calamiteuse de cet équipement choque nombre de nos concitoyens : qu’en pense le Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Pierre Lellouche, secrétaire d’État chargé du commerce extérieur.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d’État chargé du commerce extérieur. Monsieur le député, M. le secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation, qui ne peut pas être présent ce matin, vous prie de bien vouloir l’en excuser et m’a chargé de répondre à votre question.
Le parc de loisirs Cap’Découverte, situé dans le Tarn, est né, comme vous l’avez rappelé, de la volonté de reconvertir l’ancien bassin minier de la commune de Carmaux, lui-même géré dans les conditions que vous avez rappelées. Un concours international d’idées a proposé la création d’un parc de loisirs. Le syndicat intercommunal Cap’Découverte, regroupant six communes et présidé jusqu’en 2005 par M. Paul Quilès, a mis en œuvre ce projet et assure sa gestion.
Près de 58 millions d’euros ont été investis : 15,2 millions par l’Europe, 15,2 millions par l’État, 24,4 millions par les collectivités territoriales et, enfin, 3 millions par Charbonnages de France en 2002, pour les études, la communication et les équipements mobiliers.
Le parc de loisirs a ouvert mi-2003 ; il n’a pas attiré les 350 000 visiteurs escomptés. Le projet était sans doute trop ambitieux, notamment au regard des conditions d’accessibilité du site. Les investisseurs privés ne se sont pas laissé convaincre de financer les hébergements qui étaient prévus en complément.
Suite à l’avis de la Chambre régionale des comptes, le préfet a réparti les apports de chaque partie, pour résorber le déficit de 5,7 millions accumulé en 2006, de la façon suivante : 1,9 million pour l’État, 800 000 euros pour la région et 3 millions pour les communes, dont Carmaux. En 2005, l’État avait déjà versé 1,4 million d’euros et la région 1,2 million ; 90 % du déficit annuel reposent désormais sur la région et le département, 10 % sur les six communes.
Depuis 2009, grâce au renouvellement des équipements et à une politique tarifaire plus adaptée, la fréquentation a repris et atteint 100 000 entrées annuelles. Le site accueille de plus en plus de manifestations de grandes entreprises et d’associations. Il est également envisagé de louer des terrains pour la production d’électricité par l’énergie solaire, opération dont on attend 650 000 euros.
Dans un rapport de 2006, la Cour des comptes estime qu’une fermeture du parc coûterait 47 millions d’euros. Ne négligeons pas, en outre, l’apport environnemental du projet, qui a réhabilité un site de 600 hectares, très marqué par l’exploitation minière. J’ajoute que le site emploie 80 personnes.
Il semble donc nécessaire de travailler ensemble à tenter de mieux rentabiliser le projet et à tirer partie de son potentiel encore inexploité. L’opérateur de tourisme de l’État, Atout France, pourra aussi apporter son concours pour augmenter la fréquentation du site, dans le cadre de son partenariat avec la région Midi-Pyrénées.
Pour le reste, monsieur Folliot, l’Assemblée a entendu votre jugement sur l’utilisation des fonds publics, et je ne suis pas loin de partager votre avis sur ce point.
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour une très brève intervention.
M. Philippe Folliot. Monsieur le secrétaire d’État, je conteste formellement l’évaluation du coût de la fermeture du parc réalisée par la Cour des comptes. En effet, cette évaluation comprend notamment des éléments de remboursement de subventions européennes qui n’ont jamais été prouvés. Par ailleurs, si l’on tient compte des 4 millions d’euros d’argent public versés annuellement en faveur de la structure, on dépasse très rapidement la somme indiquée. Quant à la hausse de la fréquentation, elle est tout à fait artificielle, car ce parc est le seul en France où, pour le prix d’une entrée, vous avez un accès gratuit au site pour l’ensemble de la saison. Un prestataire privé ne pourrait pas se permettre ce genre de pratiques commerciales, qui ne sont possibles que parce que le département et la région versent beaucoup d’argent public. Ce sont ainsi les contribuables du Tarn et de la région Midi-Pyrénées qui assument les conséquences d’une gestion calamiteuse.